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UNIVERSITE DE PARIS IV – SORBONNE

                                         CELSA

       École des hautes études en sciences de l’information et de la communication



                                   MASTER 2e année

                        Mention : Information et Communication

                   Spécialité : Marketing, Publicité et Communication

                        Option : Stratégie de Marque et Branding



L’advergaming : au-delà de la gamification, un véritable dispositif interactif au
                 service d’une stratégie de marque durable.


                Préparé sous la direction du Professeur Véronique Richard




                                                 Nom, Prénom : Mougenot Mickaël

                                                 Promotion : 2011-2012

                                                 Soutenu le : 16 novembre 2012

                                                 Note du mémoire :

                                                 Mention :




                                                                                     1
Remerciements
Je tiens tout d’abord à remercier mon rapporteur universitaire, Stéphanie Kunert, pour ses conseils
et ses corrections lors de la préparation de ce mémoire.

Je remercie également mon rapporteur professionnel, Cyril Rimbaud, qui a pris le temps de
m’accueillir au sein de son entreprise pour m’orienter dans mes recherches et la rédaction de ce
mémoire.

Je remercie Etienne Candel, Maître de Conférence au CELSA, pour m’avoir donné l’idée du sujet lors
de son cours sur l’interaction et l’interactivité. Mes remerciements vont aussi à Ismaël Sow, ancien
étudiant du CELSA, qui a accepté de m’envoyer son mémoire de fin d’études afin que je poursuive
ses recherches.

Je tenais également à adresser mes remerciements à Eugène Ernoult, fondateur de Babble Planet,
Olivier Gatelmand, fondateur de Flagfriend, et Nicolas Rodoroff, fondateur de Pizza Driver, pour
avoir accepté de répondre à mes questions lors d’entretiens exploratoires.

Enfin mes derniers remerciements vont à Léa Besson qui m’a accompagné et supporté tout au long
lors de la rédaction de ce mémoire, de la première à la dernière ligne.




                                                                                                  2
Sommaire
1. Le brand content en ligne pour répondre à la crise des marques et de la
publicité ............................................................................................................14

   A)        Une crise de la publicité................................................................................................ 14

        1.      La publicité aujourd’hui ..................................................................................................... 14

        2.      Le déclin publicitaire .......................................................................................................... 16

        3.      L’attention publicitaire au cœur du débat ........................................................................ 21

   B)        Une évolution « digitale »............................................................................................. 26

        1.      A l’origine, des valeurs de liberté et indépendance du web ............................................. 26

        2.      L’évolution des agences de publicité................................................................................. 29

   C)        Le brand content comme opportunité........................................................................... 30

        1.      Brand content : définition et exemples ............................................................................. 30

        2.      Pourquoi les marques optent pour le brand content ? ..................................................... 33

        3.      Quels avantages par rapport à la publicité classique ? ..................................................... 34




2. L’advergaming, un dispositif interactif qui participe à une création de valeur
durable pour les marques. .................................................................................37

   A)        Le jeu vidéo et la publicité ............................................................................................ 37

        1.      Histoire du jeu vidéo : De Pong à Angry Birds ................................................................... 37

        2.      De la publicité dans le jeu vidéo ........................................................................................ 45

        3.      Pourquoi le marketing investit le jeu vidéo....................................................................... 48

   B)        L’advergaming, vers une expérience de marque différente et participative ................... 50

        1.      Gamification : analyse d’une tendance ............................................................................. 50

        2.      Emergence de la gamification : La réalité est cassée, les jeux peuvent la réparer. ......... 53

        3.      Advergaming : définition et enjeux ................................................................................... 58

                                                                                                                                                  3
C)        De l’interactivité dans l’advergame .............................................................................. 61

       1.     Quelle représentation de l’interactivité dans l’advergame ? ........................................... 61

       2.     Approche user centric : Quelle place pour le joueur dans ce dispositif ? ......................... 64

       3.     Approche brand centric : quelle place pour la marque dans ce dispositif ? ..................... 67




3e partie : Recommandations : L’advergaming comme outil d’une stratégie digitale
globale efficace et durable. ................................................................................69

  A)        De la nécessité de créer des jeux de qualité .................................................................. 69

       1.     Publicité et jeux-vidéo ne font pas forcément bon ménage ............................................. 69

       2.     Culture vidéo-ludique : l’exigence des joueurs ................................................................. 71

       3.     La qualité du contenu : la condition sine qua non pour réussir ........................................ 72

  A)        De la nécessité de rester cohérent ................................................................................ 74

       1.     L’advergame, représentant des valeurs de marque ......................................................... 74

       2.     Le game design au service des codes de la marque (logo, nom, charte graphique) ........ 76

       3.     Limites de l’advergaming .................................................................................................. 77

  B)        L’advergaming au centre d’une stratégie digitale durable ............................................. 78

       1.     Le risque du « coup de pub » inefficace et destructeur .................................................... 78

       2.     La solution d’une communication de long terme ............................................................. 80




                                                                                                                                          4
Introduction
Paradise City

La course bat son plein sous le soleil éclatant de Paradise City. Au volant de votre Ferrari Enzo vous
semez vos concurrents un par un à plus de 300 km/h, enchaînant les dérapages contrôlés et la
conduite à contre-sens tout en évitant les accidents en pagaille. Pas de doute nous sommes bien
dans un jeu-vidéo, le jeu de course d’arcade Burnout Paradise1. La première place se profile alors
qu’il vous faut encore aborder un dernier virage à toute vitesse : accélération, frein à main, puis
nouvelle accélération pour finir en beauté, la victoire ne semble plus pouvoir vous échapper. Alors
que vous apercevez la ligne d’arrivée au loin au fond de cette ligne droite, un détail attire votre
attention dans le décor : une affiche publicitaire pour Barack Obama ! Le message « Early Voting
has begun. Voteforchange.com » est soutenu par la mention « Paid for by Obama for President »2.
Cette publicité a été largement commentée et reprise sur Internet et les autres médias lors de la
campagne présidentielle américaine en 2008. Il s’agit en effet de la première publicité pour une
personnalité politique dans un jeu vidéo. Cette forme de publicité appelée « in-game advertising »
est définie de la manière suivante par Ismaël Sow, auteur du mémoire La Publicité dans les jeux
vidéo : révolution ou impasse ? : « l’in-game advertising correspond principalement à l’insertion de
bannières publicitaires dans les jeux. Ce type de publicité est particulièrement présent dans les jeux
de simulation sportive »3. La publicité in-game désigne en effet les encarts publicitaires statiques
(inamovibles, inchangeables) ou dynamiques (évolutifs, mises à jour régulièrement) présents dans
certains jeux, considérés alors comme supports de communication par les annonceurs. Ainsi cette
forme de publicité interroge sur l’hybridité du jeu vidéo, entre contenu et média, entre dispositif
ludique et support de communication.

Nous tenterons ici de poursuivre les recherches d’Ismaël Sow autour du jeu-vidéo et de la publicité,
dont la problématique de mémoire était : « Pourquoi un média tel que le jeu-vidéo, avec une si
grande audience, et dont les avantages pour la publicité ont été tant vantés, demeure malgré tout
un canal publicitaire mineur ? ».




1
  Burnout Paradise, Sortie le 24 janvier 2008 en France, Editeur Electronic Arts, Développeur Criterion Studios.
2
  Cf annexe 1 : Affiche publicitaire in-game « Barack Obama », dans Burnout Paradise.
3
  Mémoire « La Publicité dans les jeux vidéo : révolution ou impasse ? » de Ismaël Sow (p. 63) – Master 2 Professionnel Option CTN, année 2010-2011
- CELSA Paris-Sorbonne – Ecole des Mines d’Alès

                                                                                                                                                 5
Selon moi, et suite aux conclusions de ce mémoire, il était intéressant de se pencher sur un autre
cas de publicité innovante, déjà évoquée par Ismaël Sow, celui de l’advergaming. Donnons-lui tout
de suite une première définition afin de poser les bases de ce mémoire : il s’agit d’un néologisme,
contraction d’« advertising » et « gaming », qui désigne un jeu vidéo à vocation publicitaire, dont le
but est de promouvoir une marque ou un produit. Il peut prendre différentes formes, que ce soit un
jeu en Flash sur Internet, une application pour mobile ou un jeu vidéo pour console. Mais alors,
quelles différences entre advergaming et publicité in-game ? Et quelles conséquences sur
l’efficacité publicitaire ?

Les advergames permettent surtout « de rendre la marque accessible en la transformant en objet
d’interactions » selon Olivier Bertin, auteur de l’article Place au Jeu pour Influencia4. Considérés
comme des « sources de nouvelles expériences ludiques au profit d’une immersion originale dans
l’univers de la marque. »5, les advergames remettent en cause le modèle classique de la
communication, et permettent une nouvelle alternative aux publicités traditionnelles en manque
d’efficacité. Si la marque devient « objet d’interactions », il nous reste à définir cette notion, qui
serait au cœur de la stratégie de marque lorsqu’elle fait appel à l’advergaming. L’interaction
suppose un échange entre deux éléments au sein d’un système, il s’agit d’une action réciproque
comme le définit Edgar Morin dans La Nature de la Nature : « Les interactions sont des actions
réciproques modifiant le comportement ou la nature des éléments, corps, objets, phénomènes en
présence ou en influence. »6

De même que l’interaction, l’interactivité est un terme abondamment repris aujourd’hui dans les
médias. Ce sont des objets triviaux, largement utilisés et souvent réappropriés, dont la signification
évolue. Nous tâcherons donc dans ce mémoire de définir en quoi l’advergaming est un dispositif
interactif, car contrairement à la publicité in-game, l’advergaming mise sur l’interactivité entre
l’utilisateur et la marque, tout en se posant comme dispositif de communication pour l’annonceur,
ce que ne peut faire la publicité in-game, statique et fidèle au système archaïque de l’achat
d’espace publicitaire, souvent inefficace auprès des joueurs. Quels sont alors les rapports entre jeux
vidéo et publicité ? Comment le jeu vidéo influence-t-il la publicité et inversement ? Afin de
répondre à ces questions nous nous appuierons notamment sur les études d’Etienne Candel,
Maître de Conférence au CELSA, dont les travaux sur l’interactivité en ligne nous permettront de

4
    Article Place au Jeu ! sur Influencia.net, consulté le 10 avril 2012. Lien : http://www.influenciatendance.net/brandcontent/index.php?page=18#
5
    Ibid
6
    La Nature de la Nature, Edgar Morin, 1977, p. 51 (Editions Seuil).

                                                                                                                                                     6
mieux définir cette notion. Il est également nécessaire de préciser que nous aborderons dans ce
mémoire de nombreux advergames en ligne, et que nous chercherons à analyser uniquement les
dispositifs présents sur Internet ou sur mobile afin de délimiter notre sujet d’étude. En effet, le
choix de ce mémoire repose sur un constat simple : de plus en plus de marques proposent des jeux
vidéo publicitaires en ligne ou sur mobile, il semblait indispensable de nous attarder sur ce
phénomène en plein essor.

« The game layer on top of the world »

Avant d’aborder ces questions primordiales, revenons un instant sur une tendance de fond qui
explique en partie l’avènement du jeu vidéo comme outil marketing. En effet, le jeu vidéo a su
évoluer, se renouveler et surmonter les crises pour aujourd’hui arriver à son apogée. De la création
de Pong en 1972, tout premier jeu sur borne d’arcade à connaître un succès populaire, au
lancement de Kinect sur la console Xbox 360 de Microsoft en 2010 permettant de jouer sans
manette, l’industrie vidéo-ludique a su s’imposer comme le premier marché de produits culturels
dans le monde, représentant aujourd’hui plus de 33 milliards d’euros7. Cependant son influence ne
s’arrête pas à de simples chiffres et autres statistiques montrant que la moyenne d’âge des joueurs
est plus élevée qu’on ne le croit et que les femmes sont toutes aussi joueuses que les hommes. Le
jeu a investi notre culture, notre mode de vie, mais aussi notre façon de communiquer. Le processus
de gamification explique donc en partie l’émergence du jeu comme outil marketing. La gamification
est un terme anglais que l’on pourrait traduire par « ludification » en français, mais il manque dans
cette traduction l’aspect vidéo-ludique et la notion de « gaming » correspondant à l’action de jouer.
Afin de rester cohérent nous utiliserons donc dans ce mémoire uniquement le terme de
gamification. Il s’agit du « transfert des mécanismes du jeu vidéo dans la vraie vie, pour la rendre
plus ludique, plus acceptable et plus intéressante » selon l’abécédaire du jeu vidéo présent dans la
revue Tank intitulée Play Time. Communiquer à l’ère du jeu8. Voici donc un premier élément de
définition qui nous permet de mieux cerner notre sujet. Nous irons plus loin dans ce mémoire en
nous appuyant notamment sur les recherches d’Olivier Mauco, Docteur en sciences politiques,
spécialité jeux vidéo à l’Université Panthéon Sorbonne (Paris I) dont la thèse avait pour sujet :
« Jeux vidéo, problèmes publics, régulations privées. »9 La gamification a ainsi permis l’intégration


7
  Source : GFK, Magazine Trois Couleurs Hors-série #7 « Games Stories. L’histoire du jeu vidéo » p. 46 (2011 - Editions : MK2 Multimédia)
8
  Source : Définition de gamification dans la revue Tank, numéro #1, « Play Time. Communiquer à l’ère du jeu » p. 80 (2012 - Editions : Télémaque)
9
  Thèse « Jeux vidéo, problèmes publiques, régulations privées. » d’Olivier Mauco, soutenue le 28 juin 2012 à l’Université Panthéon Sorbonne (Paris
I).

                                                                                                                                                      7
de pratiques propres aux jeux vidéo dans le marketing. En ce sens, gamification et advergaming ne
s’opposent pas, ce sont deux notions complémentaires puisque l’advergaming découle de cette
invasion du jeu vidéo dans notre quotidien.

Lors d’une conférence TED en août 2010, Seth Priebatsch (fondateur de la start-up SCVNGR)
évoque la gamification lors d’un discours intitulé « The game layer on top of the world »10. A juste
titre, il explique ainsi dans un premier temps que la dernière décennie était celle du social, et
affirme que la prochaine sera celle du jeu. Il énumère notamment les différentes formes que
prennent déjà les mécaniques de jeu dans notre vie quotidienne : “There are credit card schemes
and airline mile programs, and coupon cards and all these loyalty schemes that actually do use
game dynamics and actually are building the game layer.”11 Seth Priebatsch rappelle ensuite que la
structure des réseaux sociaux existe déjà, c’est celle de Facebook qui s’est imposée en modèle. Puis
il en vient aux caractéristiques de chacune de ces « couches » : “The social layer is all about
connections. The game layer is all about influence.”12 Selon lui, l’utilisation des mécaniques de jeu
serait un moyen très efficace d’influencer notre comportement : “It’s actually about using
dynamics, using forces, to influence the behavior of where you are, what you do there, how you do
it.”13 Et la couche ludique, la gamification, pourrait être selon lui plus impactante que la couche
sociale qui a pris place ces dernières années…

Autre point, il est nécessaire de différencier l’advergame du serious game, afin de délimiter une
nouvelle fois le sujet d’étude de ce mémoire. Un serious game est un logiciel qui combine une
intention sérieuse avec des ressorts ludiques. Ses objectifs peuvent être de type pédagogique,
éducatif, informatif, communicationnel ou idéologique, et c’est ici qu’il se différencie de
l’advergame qui n’a pas cette dimension pédagogique, et dont les enjeux sont différents. En effet,
un advergame a uniquement une valeur communicationnelle et marketing pour la marque qui le
conçoit, contrairement au serious game dont l’objectif peut aller plus loin. Dans les deux cas,
l’intérêt est de faire vivre une expérience ludique à l’utilisateur, mais l’advergame se contente de
cette expérience, alors que le serious game va chercher à apprendre quelque chose, former ou
informer l’utilisateur. De plus les serious games s’adressent à une cible bien précise, comme le jeu


10
   Traduction : La couche ludique sur le toit du monde, Conférence TedX Boston de Seth Priebatsch, août 2010, visible ici :
http://www.ted.com/talks/seth_priebatsch_the_game_layer_on_top_of_the_world.html
11
   Traduction : « Il y a déjà des cartes de crédits, des programmes de compagnies aériennes, et des cartes de réduction. Tous ces programmes de
fidélité qui utilisent en fait les mécaniques du jeu vidéo et construisent la couche ludique (ou vidéo-ludique) »
12
   Traduction : « La couche sociale est faite de connections. La couche ludique se concentre sur l’influence. »
13
   Traduction : « Tout renvoie à l’utilisation des dynamiques et des forces, pour influencer où vous êtes, ce que vous faîtes, comment vous le faîtes.»

                                                                                                                                                          8
en ligne « Défi Ingénieurs »14 lancé par la SNCF pour attirer de nouveaux ingénieurs sur ses lignes.
Le budget alloué à un serious game est également souvent supérieur à celui d’un advergame. Par
exemple, l’un des plus célèbres serious games intitulé « America’s Army »15 et développé par l’US
Army et Ubisoft en 2002, s’est vu attribué un budget de 7 millions de dollars par l’armée
américaine. Le but de ce jeu de tir tactique en vue subjective (ou FPS) est d’inciter les citoyens
américains à s’enrôler dans les forces armées des Etats-Unis et de soigner l’image de cette
institution. Dans ce mémoire, nous nous consacrerons majoritairement à l’advergame, afin de nous
concentrer sur sa valeur communicationnelle et les conséquences de son dispositif interactif.

 « Play Life. Level Up. »

Sortie du travail à 18h30. Il fait beau, les terrasses parisiennes sont déjà noires de monde, vous
vous dites que ce serait bête de gâcher votre temps libre à regarder la télévision en rentrant dans
votre appartement. Vous avez envie de changement, de vous divertir… Curieux, vous jetez un coup
d’œil à vos messages/profil Facebook/compte Twitter/compte Pinterest/boîte mail personnelle :
rien de très intéressant dans cet univers hyper-connecté, sauf peut-être un tweet sur le réseau qui
gazouille. Le message est plein d’enthousiasme : « Fini le travail ! Un petit tour sur Onefeat16 pour
voir quelle nouvelle mission m’attend aujourd’hui. #addiction ». Curieux, vous vous renseignez alors
sur « Onefeat » et téléchargez l’application du même nom pour voir de quoi il s’agit. « Play Life.
Level Up. » le slogan vous intrigue. Inscription via Twitter : en quelques secondes vous faites déjà
partie de ce nouveau réseau. Un message d’accueil apparaît : « Welcome to your life. The best
adventure ever. »17 Le principe est simple : « Onefeat is a game where users complete missions by
uploading pictures »18 nous indique le premier écran après inscription. Onefeat chercherait donc à
faire entrer le jeu dans notre vie quotidienne ? Vous devez alors accepter une première mission, à
choisir parmi les suivantes : « Aller au musée et aimer ça », « Avoir sa photo dans le journal » ou
encore « Boire un cocktail dans un bar ». Certaines missions semblent plus abordables que
d’autres… En acceptant l’une de ces missions vous cumulez des points pour accéder à un niveau
supérieur, le fameux « level up » des jeux vidéo. Pour réussir une mission, il faut bien sûr le prouver
en téléchargeant une photo de vous en action. Certaines missions valent plus de points, comme
« Découvrir un gisement de lave volcanique », mais c’est à vous de choisir quelles missions vous

14
   Défi Ingénieurs, développé par TBWA Paris et SNCF, sorti le 26 septembre 2012. Consulté le 30 septembre 2012 : http://defi-ingenieurs-sncf.com/
15
   America’s Army, développé par US Army et Ubisoft, sorti le 4 juillet 2002 sur le site http://www.americasarmy.com/ et consulté le 10 juin 2012.
16
   Application mobile Onefeat, développé par Onefeat, disponible sur Itunes depuis 2011. http://onefeat.com/
17
   Traduction : « Bienvenue dans votre vie. La meilleure aventure qui soit. »
18
   Traduction : « Onefeat est un jeu où les utilisateurs réussissent des missions en téléchargeant des images. »

                                                                                                                                                 9
acceptez. L’application vise donc à influencer nos comportements au quotidien, la vie serait donc
un jeu ?

Gabe Zichermann, co-auteur du livre Game-Based Marketing avec Joseph Lindler, résume ainsi
l’influence des jeux vidéo sur le marketing : « In order to compete with games, marketing must
become a game »19. Le marketing devrait donc s’emparer de la gamification pour perdurer. La
publicité et le marketing ont toujours su refléter la société et s’en inspirer pour mieux influencer le
consommateur, c’est encore le cas aujourd’hui avec l’extension des mécaniques de jeu au
marketing. La démocratisation des jeux vidéo y est-elle pour quelque chose ? Le grand nombre de
jeux disponibles sur mobile ou en ligne et accessibles au plus grand nombre ont certainement aidé
le jeu à s’imposer dans la culture populaire, mais nous verrons par la suite qu’il ne s’agit pas
seulement de démocratisation, mais aussi et surtout d’un besoin d’interactivité auquel répond le
jeu vidéo. « Je n’ai de cesse de souligner combien l’interactivité est la force des jeux vidéo. »20
rappelle Hideo Kojima, l’un des plus influents et des plus grands créateurs de jeu-vidéo, à qui l’on
doit notamment la saga des Metal Gear. Peu connu du grand public, voici comment le qualifient
Jean-Samuel Kriegk et Jean-Jacques Launier, auteurs du livre Art Ludique : « À la fois réalisateur,
producteur et scénariste, Hideo Kojima est sans doute l’un des créateurs les plus perfectionnistes et
les plus respectés du jeu vidéo. »21 Ce dernier est ainsi bien placé pour pouvoir exprimer un constat
simple : l’interactivité est un corollaire du jeu vidéo. Comment cette interactivité est-elle perçue
dans l’advergaming ? En quoi participe-t-elle au processus de communication ?

C’est de ce constat et à partir de l’ensemble de ces questions de départ que nous avons décidé de
définir la problématique suivante : Dans quelle mesure le dispositif interactif qu’est l’advergaming
participe-t-il à une stratégie de marque efficace ?

Afin de répondre à cette problématique, nous nous appuierons sur un corpus de jeux publicitaires
variés, faisant appel à différentes fonctionnalités du Web et proposés sur différentes plateformes.
Commençons par les advergames, ici classés en trois catégories bien distinctes.




19
   Source : Introduction, p.6, Game-Based Marketing, Gabe Zichermann et Joseph Lindler (2008 – Editions : Wiley). Traduction : « Afin de
concurrencer les jeux vidéo, le marketing doit devenir un jeu »
20
   Hideo Kojima, le 11 juin 2010, Article « Hideo Kojima : L’interview à l’écrit. Tout savoir sur MGS Peace Walker. » sur Gameblog.fr, consulté le 12
avril 2012. http://www.gameblog.fr/dossier.php?id_dossier=178&page=3
21
   Art Ludique, p.228, de Jean-Jacques Launier et Jean-Samuel Kriegk (2011 – Editions : Sonatine)

                                                                                                                                                        10
Les trois premiers sont à classer dans la catégorie des advergames en ligne : Magnum Pleasure
Hunt22 et Magnum Pleasure Hunt 223 se présentent sous forme de mini-sites où l’on retrouve ces
jeux originaux lancés respectivement en mai 2011 et avril 2012 par la marque de glace Magnum du
groupe Unilever. La marque Puma propose quant à elle un jeu en ligne Run Puma Run24 qui fait
appel à la nostalgie des joueurs avec un jeu 8-bit qui rappelle les célèbres jeux sur bornes d’arcade
des années 1980.

La seconde catégorie de ce corpus est l’advergame social. Il s’agit de jeux publicitaires faisant appel
à des fonctionnalités de réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter : l’application Mini-Maps25
sur Facebook développé par le constructeur automobile Mini Cooper et Twitter Scrabble26, un jeu
original utilisant de manière intelligente les caractéristiques du réseau pour promouvoir une
nouvelle version du Scrabble.

Les advergames sur mobile représentent la dernière catégorie de notre corpus : La Chuuute27 et La
Chuuute sur Mer28 proposée par Oasis reprend les mécanismes de Doodle Jump, l’une des
applications les plus téléchargées sur smartphone.

Ce corpus est également composé de serious games comme America’s Army29 dont le but est de
recruter de nouveaux militaires dans l’armée américaine. Défi Ingénieurs30 de la SNCF permet quant
à lui de recruter de nouveaux ingénieurs.

De plus, trois autres jeux de ce corpus ont fait l’objet d’entretiens exploratoires31 par
l’intermédiaire de leurs créateurs respectifs : Babble Planet32 est un jeu éducatif destiné à
apprendre l’anglais aux enfants de 8 à 10 ans. Son fondateur Eugène Ernoult a accepté de répondre




22
   Magnum Pleasure Hunt, développé pour Magnum (Unilever) par l’agence Lowe Brindfors et B-Reel, lancé en mai 2011 sur le site
http://pleasurehunt.mymagnum.com/, consulté le 12 juillet 2012.
23
   Magnum Pleasure Hunt 2, développé pour Magnum (Unilever) par l’agence Lowe Brindfors et B-Reel, lancé en avril 2012 sur le site
http://pleasurehunt2.mymagnum.com/, consulté le 12 juillet 2012.
24
   Run Puma Run, lancé en juillet 2012 sur le site http://fr.puma.com/runpumarun, consulté le 20 août 2012.
25
   Mini Maps, développé par DDB Paris pour Mini France, lancé en juin 2011 sur l’application Facebook https://apps.facebook.com/minimaps/ et
consulté le 19 juin 2012.
26
   Twitter Scrabble, développé pour Scrabble (Mattel), lancé en juin 2012 sur http://www.twitterscrabble.be/, consulté le 27 août 2012.
27
   La Chuuute by Oasis, application mobile éditée par Orangina Schweppes France pour Oasis, disponible sur Itunes et Android Market depuis
septembre 2010.
28
   La Chuuute sur Mer, application mobile éditée par Orangina Schweppes France pour Oasis, disponible sur Itunes et Android Market depuis juin
2011.
29
   America’s Army, développé par US Army et Ubisoft, sorti le 4 juillet 2002 sur le site http://www.americasarmy.com/ et consulté le 10 juin 2012.
30
   Défi Ingénieurs, développé par TBWA Paris et SNCF, sorti le 26 septembre 2012. Consulté le 30 septembre 2012 : http://defi-ingenieurs-sncf.com/
31
   Cf annexe 2 : Entretiens exploratoires
32
   Babble Planet, serious game développé par The FWA, disponible sur l’App Store depuis mars 2012 et sur le site http://www.babbleplanet.com/fr/,
et consulté le 11 juin 2012.

                                                                                                                                               11
à mes questions. Flagfriend33 est une plateforme de jeux géolocalisés dont nous détaillerons le
concept par l’intermédiaire d’Olivier Madelmand, son fondateur. Pizza Driver34 est quant à lui un
jeu mobile innovant qui permet de gagner un produit réel, une pizza, au joueur qui aura réalisé la
meilleure performance sur un jeu bien virtuel. Ces entretiens exploratoires concernent donc un
serious game, un jeu de géolocalisation et un jeu mobile. Ils seront utilisés pour démontrer la
portée de la gamification dans notre quotidien et son influence sur l’émergence de l’advergaming.

Enfin, le dispositif Tipp-Experience35 mis en place sur Youtube sera mentionné dans ce mémoire et
fera l’objet d’une analyse pour l’élaboration de nos recommandations dans la dernière partie de ce
mémoire.

Outre les entretiens exploratoires et l’analyse des différents jeux de ce corpus, la méthodologie de
ce mémoire repose sur une analyse sémantique36 du dispositif interactif qu’est l’advergame
Magnum Pleasure Hunt 2 et une large bibliographie composée de livres spécialisés comme Art
Ludique de Jean-Jacques Launier et Jean-Samuel Kriegk37, Brand Content de Daniel Bô et Matthieu
Guével38, Game-Based Marketing de Gabe Zichermann et Joseph Lindler39, Reality is Broken de Jane
McGonigal40 ou de magazines spécialisés comme la revue Tank « Playtime, communiquer à l’ère du
jeu »41, le hors-série « Games Stories, L’histoire secrète du jeu vidéo » du magazine Trois Couleurs42.

Pour répondre à cette problématique, nous aborderons les 3 hypothèses issues de notre constat.
Nous tenterons de confirmer une première hypothèse : Le brand content en ligne propose un
nouveau modèle de communication capable de répondre à la crise de la publicité et de participer à
une stratégie de marque durable. La publicité classique aujourd’hui rejetée par les consommateurs
est en manque d’attention et d’efficacité. L’émergence du web offre une opportunité sans
précédent aux marques pour diffuser à leur tour un contenu de qualité, détaché des messages
commerciaux relayés dans les autres prises de parole de la marque. Pour confirmer cette
hypothèse, nous nous appuierons notamment sur la Société des Consommateurs de Robert


33
   Flagfriend, application mobile éditée par Flagtory, disponible sur App Store et Android Market depuis septembre 2011 et sur le site
http://www.flagfriend.com/, consulté le 3 septembre 2012.
34
   Pizza Driver, application mobile éditée par Krikoff, disponible sur App Store depuis octobre 2012.
35
   Vidéo interactive « A hunter shoots a bear » sur la chaîne Youtube TippExperience, diffusée le 25 août 2010, consultée le 27 octobre 2012 :
http://www.youtube.com/user/tippexperience
36
   Cf annexe 3 : Analyse sémantique de Magnum Pleasure Hunt 2
37
   Art Ludique, de Jean-Jacques Launier et Jean-Samuel Kriegk (2011 – Editions : Sonatine)
38
   Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod)
39
   Game-Based Marketing, Gabe Zichermann et Joseph Lindler (2008 – Editions : Wiley)
40
   Reality is broken. Why Games Make Us Better and How They Can Change the World, Jane McGonigal (2010 – Editions : Penguin Press).
41
   Tank, numéro #1, « Play Time. Communiquer à l’ère du jeu » (2012 - Editions : Télémaque)
42
   Magazine Trois Couleurs, hors-série #7 « Games Stories, L’histoire secrète du jeu vidéo » (2012 – Editions : MK2 Multimédia)

                                                                                                                                                 12
Rochefort43, afin d’expliquer le déclin publicitaire, puis sur l’ouvrage Brand Content. Comment les
marques se transforment en médias signé par Daniel Bô et Matthieu Guével36 pour mieux
comprendre l’évolution des contenus de marques sur Internet.

Par la suite, nous aborderons une seconde hypothèse tournée sur le cœur du sujet : L’advergaming
est un dispositif interactif permettant de créer une relation entre marques et consommateurs.
Après avoir revu l’histoire commune du jeu vidéo et de la publicité, à partir d’ouvrage comme
Mythologie des Jeux Vidéo de Laurent Trémel et Tony Fortin44 ou du hors-série #7 de Trois Couleurs
intitulé « Games Stories. L’histoire secrète du jeu vidéo »40, nous essaierons d’identifier les raisons
de son émergence dans la sphère marketing. Les deux principales références bibliographiques
concernant la gamification seront Game-based marketing de Gabe Zichermann et Joseph Linder37,
ainsi que Reality is broken de Jane McGonigal45. La notion d’interactivité sera abordée à partir des
recherches d’Etienne Candel, Maître de Conférence au CELSA, et d’Etienne Armand Amato, Docteur
en sciences de l’information et de la communication à l’Université de Paris 8.

Une troisième partie sera enfin consacrée aux recommandations dont le but sera de valider la
dernière hypothèse : L’advergaming participe à une stratégie de marque efficace et durable, non
pas éphémère, par son interactivité et ses capacités communicationnelles. Les recommandations
seront axées sur la nécessité de créer des jeux de qualité pour répondre à l’exigence des joueurs
internautes, de rester cohérent avec l’ensemble de la stratégie digitale globale de la marque, et
d’éviter le risque du coup de pub.




43
     La Société des Consommateurs, Robert Rochefort (2001 – Editions Odile Jacob)
44
     Mythologie des Jeux Video, Laurent Trémel et Tony Fortin, (2009 - Editions : Cavalier bleu)
45
     Reality is broken. Why Games Make Us Better and How They Can Change the World, Jane McGonigal (2010 – Editions : Penguin Press).

                                                                                                                                        13
1. Le brand content en ligne pour répondre à la crise des
        marques et de la publicité
     A) Une crise de la publicité
Le portrait de la publicité que dresse le journaliste Nick Summers dans Newsweek est sans appel :
“Time was, advertising was a relatively simple undertaking: buy some print space and airtime,
create the spots and blast them at a captive audience. Today it’s chaos: while passive viewers still
exist, mostly we pick and choose what to consume, ignoring ads with a touch of the DVR remote”46.
Même s’il faut relativiser cette description chaotique, il faut néanmoins noter qu’elle met le point
sur un phénomène qui a considérablement influencé l’évolution de la communication : l’essor du
digital. L’arrivée du web a d’autant plus bouleversé la publicité qu’elle était déjà en crise, critiquée
de toutes parts, annonçant déjà le désenchantement qui était en train de se produire.

     1. La publicité aujourd’hui

Une industrie toujours en forme malgré la crise ?

Rentrons tout de suite dans le vif du sujet : « The global advertising industry is estimated at 500$
billion »47 reporte Nick Summers dans Newsweek. La publicité se porte plutôt bien, malgré un
ralentissement de sa croissance et un exercice 2008-2009 plutôt négatif. Selon Zenith Optimedia, le
marché publicitaire mondial devrait croître de 4,3% en 2012 pour atteindre plus exactement 502
milliards de dollars. Les prévisions Monde pour 2013 et 2014 s’établissent respectivement à +5,3%
et +6,1%, ce qui annonce encore de belles années à l’industrie publicitaire48.

Ces chiffres sont cependant à relativiser, tout d’abord car ces estimations ont été revues à la baisse
par Zenith Optimedia, qui avait dans un premier temps annoncé une hausse du marché mondial de
4,8%. La crise de la Zone Euro ayant freiné les investissements publicitaires pour 2012, les
prévisions ont été moins optimistes. Ensuite, il faut noter que le marché est essentiellement tiré par
les pays émergents : « 60% de la croissance totale en provenance des pays émergents »49. En effet,
le Brésil, la Chine, la Russie ou l’Inde tirent largement le marché vers le haut, et représentent à eux

46
   Source : Article “Click this ad already!” de Nick Summers, p. 45, Newsweek, numéro du 26 mars et 2 avril 2012 (Editions : Daily Beast Company).
Traduction : « Il fut un temps où il la publicité était une entreprise relativement simple : vous achetiez un espace presse et du temps d’antenne, vous
créiez des spots et l’exposiez à un public captif. Aujourd’hui c’est le chaos : alors que les spectateurs passifs existent toujours, la plupart d’entre nous
sélectionne et choisisse quoi consommer, ignorant les publicités avec une touche de télécommande. »
47
   Source : Ibid. Traduction : « L’industrie publicitaire mondiale est estimée à 500 milliards de dollars. »
48
   Source : Article « Le marché publicitaire devrait croître moins vite que prévu en 2012 » sur lexpansion.com le 19 juin 2012, consulté le 21 juin 2012.
http://lexpansion.lexpress.fr/economie/le-marche-publiciatire-devrait-croitre-moins-vite-que-prevu-en-2012_304882.html
49
   Ibid.

                                                                                                                                                        14
seuls 35% de la croissance mondiale. Ce qui semble logique lorsque l’on sait la croissance
économique de ces pays. Si l’on s’attarde cette fois sur les chiffres du marché publicitaire français,
ils sont certes en hausse, mais bien en deçà des estimations annoncées par Zenith Optimedia au
niveau mondial. Prenons ainsi les données de l’IREP (Institut de Recherches et d’Etudes
Publicitaires) : le marché publicitaire français a augmenté de 1,9% en 2011 pour s’établir à 31,4
milliards d’euros50. Le premier trimestre 2012 est du même ordre selon le baromètre du marché
publicitaire du CNC (Centre National du Cinéma et l’image animée) : « Au premier trimestre 2012, le
marché publicitaire progresse de 2,8 % à 6 464,4 M€ »51. Certes le marché français est en hausse
mais rappelons qu’il a subi une forte baisse de -8,6% en 2009 selon l’IREP52. Les dépenses
publicitaires avaient ainsi subi de plein fouet les coupes budgétaires mises en place par les
annonceurs pendant la crise économique et financière de 2009. Le marché français redémarre donc
doucement après une année noire, mais sa croissance reste inférieure à celle des pays émergents
évoqués plus haut. La France n’est donc pas épargnée par la crise de la publicité, mais plus
globalement, ce n’est pas seulement l’économie qui est en cause.

Le marché publicitaire se répartit de manière inégale sur différents supports médiatiques ou formes
publicitaires : télévision, presse, radio, internet, affichage, cinéma, marketing direct, promotions
etc… Selon l’IREP, le premier support privilégié par les annonceurs en 2011 reste le marketing direct
avec près de 30% des dépenses en communication (29,2% plus exactement). Par marketing direct
on entend mailing, imprimés sans adresse et autres éditions publicitaires. Cependant, l’évolution
technologique pousse à une réduction de ces imprimés, par souci d’économie de papier d’une part,
et pour son côté peu pratique d’autre part. L’e-mailing serait alors envisagé comme un moyen de
remplacement tout désigné. L’email n’est pas un moyen de substitution au prospectus, mais on
peut constater que les dépenses en communication sur Internet ont encore fortement augmenté
en 2011 avec une hausse de 10,6% par rapport à 2010. Cette hausse s’explique notamment par
l’augmentation des e-mailings mais surtout par la prise en compte des publicités sur les réseaux
sociaux dans cette étude. Sans surprise, Internet continue sa forte croissance et le digital prend une
place de plus en plus importante parmi les dépenses en communication. Avec une part de marché
de 5,3%, Internet reste encore en dessous des médias classiques que sont la télévision ou la presse,

50
   Source : « Le marché publicitaire en 2011 » sur irep.asso.fr (Institut de Recherches et d’Etudes Publicitaires), le 15 mars 2012, consulté le 21 juin
2012. http://www.irep.asso.fr/actualites.php?id=124
51
   Source : « Baromètre du marché publicitaire : mars 2012 » sur cnc.fr, (Centre National du Cinéma et de l’Image animée), le 26 avril 2012, consulté
le 21 juin 2012. http://www.cnc.fr/web/fr/barometre-marche-publicitaire/-/ressources/1706821
52
   Source : « Le marché publicitaire français en 2011 » sur irep.asso.fr (Institut de Recherches et d’Etudes Publicitaires), consulté le 21 juin 2012.
http://www.irep.asso.fr/marche-publicitaire-chiffres-annuels.php

                                                                                                                                                      15
mais représente presque le double des parts de marché de la radio qui représente 2,8% des
dépenses en communication des annonceurs. La transition vers le digital est donc plus lente que
prévue et certains annonceurs restent encore frileux à l’idée d’investir ce média.

Il y a bien une crise de la publicité, en manque d’investissements et d’efficacité, mais aussi et
surtout en pleine transition vers le digital, les nouvelles pratiques de communication qui découle
des évolutions technologiques. Cependant, nous allons voir que la publicité subit également une
crise de confiance, menant à une publiphobie ambiante, remettant en cause son modèle.

     2. Le déclin publicitaire

Une publiphobie ambiante

Dans son livre intitulé La Communication Transformative, Laurent Habib, ancien Directeur Général
du groupe Havas, revient ironiquement sur l’idée que « la publicité est jugée moralement coupable
de tous les maux de la société »53. L’étude « Publicité et Société 2011 » menée chaque année par
TNS Sofres-Australie confirme cette impression en révélant que 81% des Français jugent la publicité
envahissante et que 37% sont publiphobes (chiffres en hausse)54.

Cette publiphobie ambiante se ressent également à travers les mouvements et organisations anti-
pub en France comme les Déboulonneurs, Brigade Anti Pub ou Résistance à l’Agression Publicitaire,
omniprésents depuis quelques années. Leurs valeurs sont d’ailleurs régulièrement reprises
directement ou indirectement par des artistes ou street-artists qui vont plus loin, comme Pixelator
qui recouvre les panneaux publicitaires de New York avec un filtre pixellisant la publicité, rendant
l’image poétique, non-agressive et désintéressée55. La publiphobie va de pair avec un autre
phénomène jugé inquiétant par Laurent Habib : « Près de la moitié des internautes qui fréquentent
assidûment Internet ne perçoivent même plus les bannières publicitaires sur leur écran »56.

De nombreux exemples en annexe57 de ce mémoire témoignent de cette publiphobie et prouvent
que la publicité a besoin de se renouveler et d’évoluer. Elle a longtemps voulu être considérée
comme un art. Aujourd’hui, son détournement et les critiques envers elle sont d’autant plus


53
   Source : La Communication Transformative. Pour en finir avec les idées vaines, p. 103, Laurent Habib (2010 – Editions : PUF)
54
   Source : Publicité et Société 2011 : Décrochages, étude TNS-Sofres Australie, sur tns-sofres.com le 27 septembre 2011, consulté le 24 juin 2012.
http://www.tns-sofres.com/points-de-vue/190E522A5AE444B091DE500B455C83EE.aspx
55
   Cf annexe 4 : Pixelator
56
   Source : La Communication Transformative. Pour en finir avec les idées vaines, p. 111, Laurent Habib (2010 – Editions : PUF)
57
   Cf annexe 5 : Brandalism project & street art

                                                                                                                                                      16
présents dans la culture artistique moderne, que la publicité ne l’a jamais été. La publiphobie
ambiante se ressent ainsi jusque dans les autres domaines, annonçant finalement son déclin.

La fin du rêve publicitaire ?

« La publicité, c'est l'art des cavernes du XXe siècle » osait commenter Marshall MacLuhan en 1988.
Une manière détournée de la considérer comme une forme d'art, tout en critiquant sa forme
primaire.

Nous n'allons pas ici revoir en détail l'histoire de la publicité, mais plutôt nous concentrer sur la
« publicité du rêve » (c'est ainsi que nous l’appellerons) qui a officié durant les années 1980-1990.
Afin de mieux comprendre cette période, il est tout de même nécessaire de revenir brièvement sur
les principales évolutions dans l'histoire de la publicité, telle que nous la connaissons aujourd'hui.

Le rêve porté par la publicité durant les années 1980 commence à s'éteindre lentement. Il s'agit là
d'ailleurs d'une autre explication de la publiphobie ambiante évoquée plus haut. La publicité a été
très décriée pour avoir été excessive dans la représentation de valeurs idéales et superficielles
durant les années 1980-1990. Gilles Lipovetsky, auteur de l’Ere du Vide58, reivent dans la revue
Médias sur la place de la publicité dans la société en lui admettant un certain pouvoir : « Il est
évident que les médias et la publicité véhiculent des normes, en particulier concernant le corps des
femmes. Cela a créé un nouveau type de comportement, l’aspiration esthétique. L’image de
référence est devenue celle de la jeunesse et du corps svelte. »59 Outre sa faculté à véhiculer des
références, la publicité valorise le consommateur autant qu’elle le fait rêver dans une ère où
l’individualisme est roi et le narcissisme la norme.

Le rêve publicitaire s'est éteint en même temps qu'est apparu le sentiment de révolte des
consommateurs, qui s'est ensuite traduit un peu plus tard par une volonté de transparence et de
rassurance des marques pour répondre aux attentes des consommateurs. La publicité ne devait
plus vendre du rêve mais rassurer : « Assailli par des inquiétudes de toutes sortes, l’individu
cherche dorénavant à être rassuré. Cela entraîne des changements dans ses choix de
consommateur. Tel est le basculement des années 1990. Quel contraste avec le temps des années
1980 au cours desquelles la consommation exaltait la toute-puissance de l’individu triomphant et


58
  L'Ère du vide de Gilles Lipovetsky, Editions Gallimard, paru le 22 septembre 1983
59
  Article « La Télévision n’est pas le nouveau malin génie » par Serges Guérin, extrait de la revue Médias N°6, septembre 2005, consulté le 11 octobre
2012 : http://www.revue-medias.com/La-television-n-est-pas-le-nouveau,132.html

                                                                                                                                                  17
lui proposait d’oublier ses soucis grâce au plaisir éphémère et superficiel ! » commente Robert
Rochefort dans La Société des Consommateurs60.

Un stade de la consommation succède donc à un autre, ce qui se traduit par différentes grandes
tendances de communication liées à ce stade de consommation. L'ère du vide et du rêve n'est pas
aujourd'hui tout à fait terminée, même si elle semble révolue, on retrouve encore quelques-unes
de ses grandes idées dans certaines publicités, notamment pour le luxe et la mode. La campagne de
publicité « Beach Sensation » pour les maillots de bain H&M61 présentant des mannequins au
bronzage superficiel dans un décor de rêve est un bel exemple. Ces publicités n’ont pas plu aux
consommateurs, ni au Fonds Cancer Suédois qui s’était indigné du bronzage excessif auquel incite
indirectement la publicité: « Ces femmes en bikini extrêmement bronzées confirment un idéal de
beauté dangereux pour la santé »62. La marque a ainsi dû présenter ses excuses dans un
communiqué de presse officiel, expliquant que le bronzage du mannequin brésilien Isabeli Fontana
permettait de mieux faire ressortir les maillots de bain de la marque. Quoi qu’il en soit cette
polémique nous apprend une chose : les consommateurs ne sont pas dupes et ils n’hésitent plus à
se faire entendre, notamment sur Internet, lorsqu’une publicité va trop loin.

Les marques ont donc bien compris qu’il leur fallait miser sur autre chose pour communiquer, et on
a vu émerger une nouvelle ère de communication ces dernières années en France et dans les pays
Occidentaux, l’ère de la transparence. S’intégrant dans différentes sphères de la communication, on
la retrouve aisément dans des publicités, des packagings ou même sur des sites Internet. Premier
exemple, le spot publicitaire « Back to the Start » pour la marque Chipotle63 récompensé par un
Grand Prix au 59e Festival International de la Créativité Cannes Lions qui a eu lieu du 17 au 23 juin
2012. L’histoire de ce film de deux minutes est celle d’un agriculteur exploitant une petite ferme
d’animaux, qui va grandir de plus en plus avant d’atteindre une taille critique et industrielle que
l’agriculteur rejette. Il décide alors d’ouvrir à nouveau ces enclos et de laisser libres ces animaux, et
recommencer depuis le début pour ne pas retomber dans un élevage industriel. Il rejoint ensuite sa
famille, dont le fils qui a l’air d’être intéressé par l’élevage lui aussi. Le film se termine sur le
message « Cultivate a better world »64. La marque Chipotle utilise le storytelling pour mieux

60
   Chapitre VI « La consommation doit rassurer », p. 139, La Société des Consommateurs, Robert Rochefort (2001 – Editions Odile Jacob)
61
   Cf annexe 6 : Publicités H&M (Mai 2012)
62
   Source : H&M s'excuse d'une publicité "trop bronzée", Théodore Doucet, sur Europe1.fr le 11 mai 2012, consulté le 12 juin 2012.
http://www.europe1.fr/International/H-M-s-excuse-d-une-publicite-trop-bronzee-1079113/
63
   Source : « Back to the Start » de Chipotle Mexican Grill, diffusé à partir du 25 août 2011 sur Youtube.
http://www.youtube.com/watch?v=aMfSGt6rHos
64
   Traduction : « Cultiver un monde meilleur »

                                                                                                                                         18
toucher le spectateur. Selon Christian Salmon, auteur de Storytelling. La machine à fabriquer les
images et à formater les esprits65, le storytelling est l’art de raconter des histoires, dans le but de
convaincre le consommateur. « Mais aussi de le plonger dans une histoire dont il pourrait être le
héros. Le storytelling correspond à la construction consciente de croyances destinées à des
consommateurs en manque de repères. » précise Nelly Quemener, dans son analyse pour la revue
Communication66.

Le storytelling n’est donc pas uniquement un moyen d'orienter le consommateur, il lui permet de
se sentir (un peu) plus actif. La publicité classique a longtemps fait rêver les consommateurs et l'on
peut remarquer que cette notion de rêve est commune à une autre pratique, celle du jeu-vidéo. En
effet, les mécaniques du jeu vidéo tentent de satisfaire le joueur alors que son univers et son
histoire tentent de l'immerger dans un rêve éveillé auquel le joueur aura envie de faire partie.

Nous parlons évidemment ici du jeu vidéo classique, et non du jeu vidéo publicitaire. Des jeux tels
que Grand Theft Auto Vice City67 où le joueur se retrouve totalement libre et capable de faire ce
qu'il veut (ou presque) dans une ville aux allures de Miami. Autre exemple, les jeux de course
automobile comme la série des Burnout ou celle des Need For Speed où le joueur peut déambuler
dans les rues des plus grandes capitales du monde à plus de 200 km/h, relèvent totalement du
rêve. Les univers originaux créés par les studios d'Ubisoft sont également une référence, de Prince
of Persia à Beyond Good & Evil en passant par Assassin's Creed où le héros revit l'histoire de son
ancêtre, un assassin d'élite pendant les Croisades.

Les univers d'autres jeux vidéo mythiques font également penser à des décors féériques, tout droit
issus de rêves. Prenons par exemple, les jeux créés par Shigeru Miyamoto : « la liste des jeux sortis
de l'imagination constitue la plus impressionnante série de chefs d'œuvre vidéo-ludiques que l'on
puisse imaginer. »68

Le personnage le plus célèbre créé par Miyamoto reste sûrement Mario, dont la licence de jeu
vidéo est la plus vendue au monde avec plus de 210 millions d'exemplaires. Mario69 est un plombier
italien moustachu habillé d'une casquette rouge et d'une salopette bleue, apparu pour la première


65
   Storytelling. La machine à fabriquer les images et à formater les esprits, Christian SALMON, (2007 - La Découverte).
66
   Lecture « Christian SALMON (2007), Storytelling. La machine à fabriquer les images et à formater les esprits », Nelly Quememer, dans
Communication, Vol. 29/2 2012. Texte intégral : http://communication.revues.org/index2635.html
67
   Grand Theft Auto : Vice City, Rockstar Games, Sorti en 2003 sur PC.
68
   Source : Art Ludique, p.404, de Jean-Jacques Launier et Jean-Samuel Kriegk (2011 – Editions : Sonatine)
69
   Cf annexe 7 : Super Mario

                                                                                                                                          19
fois en 1981 dans le jeu Donkey Kong sous le nom de Jumpman, où il devait secourir une princesse
en détresse70. Le premier jeu dédié exclusivement à ce personnage s'intitule Super Mario Bros. Sorti
en 1985 sur NES (Nintendo), ce jeu prend forme dans un univers féérique où Mario doit tenter de
délivrer la princesse Peach, prisionnière du château de Bowser, sorte de dragon démoniaque
anthropomorphique71. Dans ce périple, Mario est accompagné de son frère Luigi, autre plombier
italien moustachu habillé de vert, et de Yoshi, un dragon vert qui pond des œufs multicolores.
Mario doit traverser le Royaume Champignon et de nombreux « mondes » débordants de
champignons, d'étoiles, d'obstacles et de pièges en tout genre, remplis de tortues à carapaces
rouges, de fleurs crachant des boules de feu, ou encore de Chain Chomp, une boule noire géante se
comportant comme un chien attaché à une chaîne. Autant de péripéties et d’originalités dignes
d’un rêve !

« L'une des plus attachantes facettes du génie artistique de Miyamoto est d'avoir puisé au sein
même de la nature et de ses émotions d'enfant toute l'inspiration des logiciels qu'il a ensuite
conçus pour faire jouer et rêver les générations suivantes »72 commentent Jean-Jacques Launier et
Jean-Samuel Kriegk, auteurs d'Art Ludique. Miyamoto a fait rêver des générations de joueurs grâce
à ces univers et ces personnages. Nous n'avons cité que Super Mario Bros ou Donkey Kong mais
nous aurions pu également évoquer The Legend of Zelda73 où le jeune Link à l’aide de son épée et
son bouclier, traverse le monde fantastique d’Hyrule afin de retrouver les huit fragments de la
Triforce et sauver la princesse Zelda. Ces jeux féériques sont autant de jeux cultes participant à
l’histoire mythique du jeu vidéo.

Tout comme la publicité durant ses glorieuses années, les jeux vidéo font rêver ou ont fait rêver de
nombreux joueurs. Prolonger la relation entre marque et consommateur au sein d'un jeu vidéo
publicitaire permettrait donc de poursuivre le rêve publicitaire d'une nouvelle manière ?
Certainement, mais à condition que le jeu vidéo soit de bonne qualité, sans quoi le joueur
internaute passera son chemin. Faire rêver les joueurs peut s'avérer beaucoup plus compliqué pour
les marques, c'est ce que nous verrons par la suite dans la description du game design et de
l'intérêt de l'advergame pour les internautes-consommateurs. Quoi qu’il en soit, la passerelle entre



70
   Cf annexe 8 : Jumpman dans Donkey Kong, sur borne d’arcade (1981 – Nintendo).
71
   Cf annexe 9 : Super Mario Bros, sur NES, (1985 – Nintendo)
72
   Source : Art Ludique, p.400, de Jean-Jacques Launier et Jean-Samuel Kriegk (2011 – Editions : Sonatine)
73
   Cf annexe 10 : The Legend of Zelda, sur NES (1986 – Nintendo)

                                                                                                             20
jeu-vidéo et publicité établit ici est indispensable pour comprendre l’émergence de l’advergaming
comme pratique de communication.

On retiendra que le jeu vidéo représente une véritable opportunité, dans la continuité de l’âge d’or
de la publicité. Michel Foucault parlait ainsi des espaces ludiques en 1984 : « l’espace de jeu paraît
une utopie dans laquelle je ne suis pas réellement » comme le reporte Tony Fortin et Laurent
Trémel dans Mythologie des Jeux Vidéo. Ils poursuivent alors « les espaces ludiques sont
certainement pour beaucoup des « hétérotopies » au sens de Michel Foucault, c’est-à-dire des lieux
concrets, réels, qui hébergent une utopie. »74. Le jeu vidéo serait donc l’endroit idéal pour allier une
histoire utopique à une expérience ludique. Tony Fortin et Laurent Trémel confirment même que
« les scénarios des jeux vidéo apparaissent en effet souvent fondés sur un itinéraire – le parcours
du héros – assimilés par certains observateurs à celui des contes. » La présence de storytelling est
un autre point commun du jeu vidéo et de la publicité, tous deux peuvent donc logiquement se
rejoindre au sein de l’advergaming, afin d’attirer à nouveau l’attention du spectateur, de plus en
plus actif et exigeant.

     3. L’attention publicitaire au cœur du débat

« Aujourd’hui, la rareté n’est plus l’information, mais bien l’attention. A une époque où le public
devient de plus en plus volage, surfant de page Web en page Web, papillonnant de chaîne en
chaîne, le jeu vidéo dispose d’un avantage majeur : il permet de garder disponible l’utilisateur en un
même lieu. »75

La notion de « Return On Attention » semble remplacer progressivement celle de « Return On
Investment » tant utilisée dans le marketing pour mesurer l'efficacité et la rentabilité des actions
marketing. Selon l'abécédaire du jeu vidéo de la revue Tank « le ROA mesure la visibilité d'une
campagne de communication plurimédia. »76 Historiquement, l'attention publicitaire a toujours été
considérée par les professionnels de la communication dans l'élaboration de leurs stratégies. Pour
preuve le modèle AIDA qui représente les différentes phases que doit respecter un message
publicitaire :




74
   Mythologie des Jeux Video, p. 30, Laurent Trémel et Tony Fortin, (2009 - Editions : Cavalier bleu)
75
   Source : Article « Le jeu, nouvel espace de relations sociales », p. 35 , Tank, numéro #1, « Play Time. Communiquer à l’ère du jeu » (2012 - Editions :
Télémaque)
76
   Source : Ibid, p 81.

                                                                                                                                                      21
-    Attirer l'Attention
        -    Susciter l'Intérêt
        -    Provoquer le Désir
        -    Inciter à l'Action

C'est bien ce premier point qui nous intéresse : attirer l'attention. Comment capter un utilisateur
hypersollicité sur le web et dont l'attention vaut de l'or à l'heure où les audiences s'écroulent et où
les consommateurs tentent de reprendre le contrôle sur le message ?

Le problème de l’attention publicitaire, développé plus en détails par Daniel Bô et Matthieu Guével
dans Brand Content, Comment les marques se transforment en médias77, fait partie des mutations
au sens large qui ont influencé le monde de la communication ces dernières années.

Ils identifient ainsi trois mutations de la communication :

        -    L’essor d’Internet et de la numérisation
        -    L’essor de la communication responsable
        -    La remise en cause des discours

L’essor d’Internet et de la numérisation est le point qui nous intéresse tout particulièrement car il
révèle les évolutions du contexte médiatique, dont la première est, selon Daniel Bô et Matthieu
Guével, la fragmentation de l’audience et la dispersion des publics : « Le modèle traditionnel de la
communication des marques postulait l’existence de quelques médias de masse, et la possibilité de
réunir un grand nombre de personnes devant un même contenu au même moment. »78 Ce modèle
est aujourd’hui remis en cause par la fragmentation de l’audience causée par la multiplication des
chaînes de télévision et surtout l’arrivée d’Internet. Les auteurs anticipent même que : « la
démocratisation de l’Internet mobile, l’essor de la catch’up TV vont encore multiplier les canaux et
accès individuels aux contenus. »79 Rajoutons à cela l’arrivée de la TNT (Télévision Numérique
Terrestre), le piratage de contenus, et surtout l’essor de la télévision connectée, qui fait aujourd’hui
l’actualité dans le milieu des médias, et qui risque de contribuer fortement à la remise en cause du
modèle traditionnel de la publicité, basé sur l’audience. Le schéma choisi par Daniel Bô et Matthieu
Guével pour représenter les conséquences de l’érosion de l’audience sur la publicité et la qualité


77
     Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod)
78
     Ibid, p. 16
79
     Ibid, p. 29

                                                                                                                             22
des contenus est le suivant : l’érosion des audiences des contenus entraîne une baisse de
l’efficacité publicitaire. En effet - et cela semble logique - s’il y a moins de téléspectateurs, la
publicité touchera moins de monde. Cette baisse de l’efficacité publicitaire a pour conséquence une
réduction des ressources consacrées à la publicité et donc au financement des contenus. Les cibles
de communication n’étant pas forcément atteintes et les indicateurs de performances n’étant pas
satisfaisant, la publicité bénéficie de ressources réduites par la suite. Ce qui entraîne au final une
moindre qualité des contenus et donc, encore une fois une baisse des audiences de ces contenus.
Voilà comment est justement présenté « le cercle vicieux de l’érosion des audiences » par Joseph
Jaffe dans Life After 30-second Spot, repris dans Brand Content80. Si communiquer, c’est
transmettre un message, alors on peut constater aujourd’hui que les marques ont de plus en plus
de mal à communiquer…

Symbole de l’érosion des audiences, TF1 a récemment enregistré son mois d’audience le plus faible
de son histoire avec seulement 22,2% de part d’audience81. Loin des 40% d’audience dont elle avait
l’habitude jusqu’au début des années 2000, la première chaîne française ne cesse de voir ses
audiences chutées. Les causes citées plus haut, à l’origine de cette érosion, participent à la fin d’une
ère médiatique dominée par la course à l’audience où TF1 vendait « du temps de cerveau
disponible » à Coca-Cola selon la célèbre formule de Patrick Le Lay, ancien PDG de TF1. La chaîne
est ainsi obligée de revoir ses tarifs publicitaires à la baisse, ce qui entraîne une baisse de la qualité
des contenus.

Ainsi, si TF1 ne parvient plus si facilement à toucher une audience large et à l’écoute, on peut
également s’intéresser à la notion de saturation des contenus, de plus en plus actuelle avec la
démocratisation d’Internet et qui remet tout à fait en cause l’efficacité publicitaire. Notons tout
d’abord que par « démocratisation d’Internet » nous entendons l’utilisation de plus en plus
courante d’Internet par des millions d’internautes grâce à l’accès au haut débit en illimité dans des
millions de foyers. On peut considérer que cette démocratisation a débuté à partir de la fin des
années 1990, et que son impact s’est véritablement ressenti à partir des années 2000 avec la
multiplication des fournisseurs d’accès à Internet en France.




80
  Ibid, p. 30
81
  Source : Article « AUDIENCES JUIN : TF1 AU PLUS BAS, M6 AU PLUS HAUT, NRJ 12 DOUBLE CANAL+ », Julien Lalande, sur Ozpa.com, publié le 2
juillet 2012, consulté le 26 juillet 2012. http://www.ozap.com/actu/audiences-juin-tf1-au-plus-bas-m6-au-plus-haut-nrj-12-double-canal/441729

                                                                                                                                                23
Internet, ce réseau mondial informatisé basé sur la liberté, le partage et la gratuité, a permis
d’accéder à une profusion d’informations et de contenus en tout genre. « Il n’y a plus assez de 24
heures d’une journée pour regarder tous les contenus accessibles facilement sur une quantité
croissante de supports »82 résument plutôt bien les auteurs de Brand Content. Cette profusion de
contenus a donc engendré une « hyper-sollicitation de l’attention » : l’internaute est sollicité de
toutes parts et peut faire le choix de choisir librement le contenu qu’il souhaite regarder, il faut
donc que le contenu de marque soit de qualité, attractif et affinitaire pour que l’internaute soit
intéressé.

« Dans une économie de l’attention, seul le contenu capable d’attirer l’attention et de la retenir
pourra tirer son épingle du jeu » 83 confirment ainsi les auteurs. Sur Internet, un spot publicitaire
semble donc peu enclin à attirer l’attention face à des contenus désintéressés, surtout dans un
contexte défavorable que nous avons évoqué précédemment de publiphobie ambiante. Le digital
est un environnement saturé, comment alors favoriser un contenu de marque face à l’hyper-
sollicitation dont sont victimes les internautes ? La profusion de contenus participe à l’inefficacité
publicitaire car l’internaute ne ressent pas l’intérêt de regarder des contenus publicitaires alors qu’il
a le choix. De plus, les nombreuses publicités qui sont visibles avant le visionnage d’une vidéo sur
les plateformes comme Youtube ou Dailymotion, semblent se généraliser mais posent toujours le
problème de l’attention de l’internaute. Comment savoir si l’internaute voit réellement la
publicité ? Comment mesurer l’efficacité de cette pub alors que l’internaute peut être en train de
faire autre chose sur un autre site en parallèle ? Pour résoudre ce problème, de nombreuses
plateformes de vidéo contraignent l’utilisateur à visionner une publicité avant une vidéo : cette pub
se met en pause si l’internaute change de fenêtre sur son navigateur ou s’il coupe le son. Un
dispositif plus que gênant et polémique en termes de liberté de navigation sur le web. Les marques
doivent donc trouver un nouveau moyen d’attirer l’attention des consommateurs afin de faire
passer leurs messages de manière moins contraignante.

Valéry Pothain, auteure de l'article « Les Marques doivent jouer le jeu » pour CB News résume ce
que peut résoudre le jeu vidéo au problème de l'attention publicitaire : « Le consommateur n'a plus
une minute pour regarder un écran publicitaire, mais il arrivera toujours à en trouver dix pour
exploser des cochons à grands coups d'oiseaux avec Angry Birds. Contrairement à l'idée reçue, le

82
     Source : Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, p. 37, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod)
83
     Ibid, p. 38

                                                                                                                                             24
problème n'est donc pas tant sa rareté que le moyen de se l'accaparer à des fins commerciales. »84
Nous reviendrons plus en détail sur les solutions apportées par les marques pour répondre à ce
manque d'attention (l’advergaming notamment), mais intéressons-nous un instant au rôle du
consommateur dans ce schéma de communication, et la révolution du modèle appelé « top-
down ».

Le modèle révolu de la communication « top-down »

Ce modèle de communication consiste à considérer que la marque (top) communique de manière
magistrale envers ses consommateurs (down). « La démocratisation du métier d'éditeur » comme
l'évoque le livre Brand Content85, permet à tout le monde de créer du contenu et court-circuiter les
médias traditionnels. C'est ce changement de statut qui intéresse actuellement les professionnels
de la communication, où, dans une économie de l'attention, les spectateurs ne vont plus forcément
se tourner vers des contenus publicitaires, mais vont chercher à reprendre le contrôle. En ce sens,
le modèle « top-down » des grands discours de marques est révolu, il laisse place à une prise de
participation du consommateur, de quelque manière que ce soit : « After decades of advertisers
blaring messages at consumers, those consumers now have their own megaphones to blare
back. »86 prévient Nick Summers.

« Le consommateur/internaute est passé de spectateur de campagnes de publicité à acteur
diffuseur de contenus de marque. Il est en attente de divertissement et de sensation, il veut être
surpris à chaque rencontre avec la marque. Il peut pouvoir interagir, personnaliser le contenu pour
ensuite le partager avec sa communauté. Les webséries, les jeux vidéo sont les médias de
l'innovation et du participatif. Ils permettent de faire émerger les marques par un contenu créatif
fort et différenciant. » Selon Romain Mourgue, Directeur New Business d'Ilomba Images87.

Différenciant et participatif, voici donc les maître-mots des contenus attendus par les
consommateurs. Comment se caractérise alors ce changement de statut pour le consommateur ?
Cela passe par du partage sur les réseaux sociaux (Facebook et Twitter en tête), du User Generated
Content (UGC) sur des plateformes vidéo comme Youtube ou Dailymotion, ou d'autres plateformes
84
   Source : Article « Les marques doivent jouer le jeu » p.46, Valéry Pothain, CB News, « La pub cherche son gameplay » (Juin 2012 – Dupuis Presse
France)
85
   Source : Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, p. 36, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod)
86
   Source : Article “Click this ad already!” de Nick Summers, p. 47, Newsweek, numéro du 26 mars et 2 avril 2012 (Editions : Daily Beast Company).
Traduction : « Après des décennies où les publicitaires pouvaient hurler des messages aux consommateurs, ces consommateurs ont maintenant leurs
propres mégaphones pour hurler en retour. »
87
   Source : Article « Le jeu, nouvel espace de relations sociales », p. 39 , Tank, numéro #1, « Play Time. Communiquer à l’ère du jeu » (2012 - Editions :
Télémaque)

                                                                                                                                                      25
proposées par les marques, comme par exemple Procter and Gamble pour la campagne Thank You
Mom où les internautes pouvaient adresser un message de remerciement à leurs mères par
message textuel ou vidéo88.

À la notion de Return on Attention s'ajoute donc celle de « Return on Engagement », dont la
fonction est de « mesurer l'implication et l'interaction des internautes : simple lecture d'un article,
partage et discussion dans un réseau social, rédaction d'un avis, création d'UGC... »89 selon
l’Abécédaire du jeu vidéo de la revue Tank.

L'implication et la prise de participation, voire de contrôle du consommateur, révolutionne donc le
modèle de communication, et favorise l'avènement de nouveaux modes de communication pour
mieux capter l'attention des consommateurs, comme l'advergaming, qui s'est fait une belle place
sur Internet, cette toile vecteur de liberté et d'autonomie de l'utilisateur.

     B) Une évolution « digitale »
     1. A l’origine, des valeurs de liberté et indépendance du web


« La Quadrature du Net est une organisation de défense des droits et libertés des citoyens sur
Internet. Elle promeut une adaptation de la législation française et européenne qui soit fidèle aux
valeurs qui ont présidé au développement d'Internet, notamment la libre circulation de la
connaissance. À ce titre, la Quadrature du Net intervient notamment dans les débats concernant la
liberté d'expression, le droit d'auteur, la régulation du secteur des télécommunications ou encore
le respect de la vie privée. Elle fournit aux citoyens intéressés des outils leur permettant de mieux
comprendre les processus législatifs afin d'intervenir efficacement dans le débat public. »90 Telle est
la description de la mission de la Quadrature du Net, symbolique de l’esprit de liberté et
d’indépendance revendiqué par Internet pour assurer son développement dans la gratuité et le
partage.


« Au commencement était le code et la liberté », voici comment Fabien Benoît intitule le chapitre
consacré à la création d'Internet dans les années 1960-1980, dans le numéro 2 d'Usbek et Rica



88
   Chaîne Youtube de Procter & Gamble, consulté le 12 août 2012 : http://www.youtube.com/proctergamble?x=us_thankyoumom
89
   Source : Abécédaire du jeu vidéo, p. 81 , Tank, numéro #1, « Play Time. Communiquer à l’ère du jeu » (2012 - Editions : Télémaque)
90
   Source : « Qu’est-ce-que la Quadrature du Net ? », surlaquadrature.net, consulté le 12 août 2012. http://www.laquadrature.net/fr/qui-sommes-
nous

                                                                                                                                              26
« Hackers, la révolution cool »91. Ainsi, l’origine d'Internet est marquée par une période où «
chacun peut reprendre librement les idées des autres et les améliorer. Et ce, dans l’intérêt de tous.
C’est dans cet esprit que les hackers composent les premiers programmes informatiques. »92
L'auteur conclut d’ailleurs : « Liberté et partage sont les lignes directrices ». Cependant, dès le
début des années 1970, les grands fabricants de matériel informatique créent des logiciels
« propriétaires » afin d'en restreindre la réutilisation : « ils prônent la fermeture, les hackers
l'ouverture. »93


Richard Stallman, véritable icône du hacker durant les années 1980, s'est toujours opposé au
logiciel propriétaire, et à la régulation d'Internet. Après avoir lancé le GNU (GNU is Not Unix) en
1984, un système d'exploitation libre pour « ramener l'esprit de coopération qui prévalait dans la
communauté des hackers dans l'informatique grand public »94, cet ancien du MIT décide de fonder
en 1999 une encyclopédie libre fondée sur le crowsourcing : Wikipédia. Fabien Benoît revient sur la
création de l’encyclopédie : « Pour Stallman, la quête dépasse le simple cadre du logiciel, elle est
philisophique. L'homme ne doit pas devenir l'esclave des machines et de ceux qui en auraient
l'exclusivité de leur programmation […] Pour lui les savoirs doivent circuler librement. »95


Analysons ainsi cette notion de crowdsourcing, dont on peut ironiquement trouver une définition
très complète sur Wikipédia : « le crowdsourcing, un des domaines émergents de la gestion des
connaissances, est l'utilisation de la créativité, de l'intelligence et du savoir-faire d'un grand nombre
de personnes, en sous-traitance, pour réaliser certaines tâches traditionnellement effectuées par
un employé ou un entrepreneur. »96 En ligne, ce néologisme est donc un moyen de définir le travail
collaboratif reposant notamment sur les internautes comme contributeurs de contenu.


La contribution des consommateurs/utilisateurs sur Internet est de plus en plus sollicitée par les
marques comme un moyen de renouveler les pratiques de marketing et de s'adapter aux évolutions
technologiques.


Le web se doit d'être libre, gratuit, de valoriser les internautes en prônant leur participation et le
partage. Cependant, le développement d'Internet à partir des années 1990 a progressivement

91
   Source : Usbek et Rica, numéro 2 « Hackers, la révolution cool », p. 22 (Printemps 2012 – Usbek et Rica)
92
   Ibid, p. 22
93
   Ibid, p. 22
94
   Source : Usbek et Rica, numéro 2 « Hackers, la révolution cool », p. 23 (Printemps 2012 – Usbek et Rica)
95
   Ibid, p. 24
96
   Source : Article “Crowdsourcing” sur Wikipedia.com, consulté le 10 août 2012. http://fr.wikipedia.org/wiki/Crowdsourcing

                                                                                                                              27
généré de plus en plus d'investissements publicitaires sur le web. Il est donc nécessaire de souligner
le paradoxe qui touche ce média depuis quelques années, alors même que nous allons aborder plus
en détail le sujet de l'advergaming en ligne. Les valeurs d'Internet, si l'on remonte à ses origines
comme nous venons de le faire, sont en contradiction avec celles de la publicité, intéressée et
commerciale, qui prône des valeurs marchandes, et régit le fonctionnement du web puisque la
plupart des business models des sites web reposent sur la publicité. Pour preuve, 97% des revenus
de Google reposent sur la publicité en 201197, ce qui semble logique puisqu'il s'agit du site le plus
visité au monde selon Alexa. Il rassemble 48% des internautes, juste devant Facebook deuxième
site le plus consulté avec 45% des internautes98 et dont les revenus reposent également
majoritairement sur la publicité, à hauteur de 85% en 201199.


Inspirés par les autres médias, de nombreux sites ont basé leur business models sur la publicité, ou
d'autres alternatives répondant à des logiques « commerciales » : billets sponsorisés par des
marques sur des blogs ou des sites spécialisés, intéressement sur des liens renvoyant à des sites e-
commerce, liens sponsorisés dans les moteurs de recherche etc. Tout comme la presse, la télévision
ou la radio, les revenus publicitaires des sites Internet reposent sur leur audience, leur nombre de
visites ou de pages vues. Difficile alors de parler d'indépendance ! Cependant, l'avènement du web
2.0 à partir de 2005, que l'on décrit comme participatif et plus interactif, permettant aux
internautes de devenir plus actifs et contribuer à leur tour à son développement. Grâce à cela,
Internet a évolué, mais les marques ont également dû adapter leurs discours et leur manière de
communiquer. La forme du message a eu une incidence sur le fond : les marques ne communiquent
plus uniquement sur elles-mêmes à destination des consommateurs (modèle top-down), mais
proposent un contenu à un public, parfois détaché de leurs domaines d’activité, de leurs fonctions
commerciales.


L'émergence d’Internet puis de la vague sociale durant les années 2000, avec la naissance de
Facebook et Twitter ont permis aux marques d’entrer en contact plus direct avec leurs publics. De
plus, le changement de discours des marques, dans l'obligation de revoir le modèle classique de la
publicité, dépassé et inadapté, a permis l'arrivée d'un nouveau mode de communication :


97
   Source : “Where’s Google making its money” sur PCInpact.com, le 19 juillet 2011, consulté le 22 août 2012.
http://www.pcinpact.com/news/64689-google-revenus-publicitaires-assurances-pret.htm
98
   Source : Topsites sur alexa.com, consulté le 22 août 2012. http://www.alexa.com/topsites
99
   Source : Article « Facebook: 85% des revenus par la publicité, 12% par Zynga » sur Maxisciences.com, le 2 février 2012, consulté le 22 août 2012.
http://www.maxisciences.com/facebook/facebook-85-des-revenus-par-la-publicite-12-par-zynga_art21328.html

                                                                                                                                                   28
le brand content. Avec la démocratisation du web, les marques ont donc saisi cette opportunité,
contraintes quoi qu’il arrive de s’adapter, pour proposer un contenu majoritairement en ligne, dans
lequel s’inscrit l’advergaming.

        2. L’évolution des agences de publicité

On comprend un peu mieux la perception de l’incursion du digital dans le monde de la publicité
avec le livre célébrant les 10 ans de l’agence Leg réunissant les plus belles publicités sur papier de
cette dernière. Ce livre intitulé Merde à Internet. Dix ans de publicité sur papier de l’agence Leg100
traduit ainsi parfaitement le ressentiment des publicitaires vis-à-vis d’Internet et son impact dans le
monde de la communication. Le texte de la quatrième de couverture du livre évoque bien de façon
ironique les enjeux du web aujourd’hui, que l’agence Leg tente d’ailleurs d’ignorer : « Internet est-il
le tout média qui va se substituer à tous les média ? L’interactivité sonne-t-elle le glas de la
communication unilatérale ? Twitter est-il le média des post-ados ou des post-addicts ? Facebook
peut-il faire tomber les dictatures ou nous éloigne-t-il du monde réel ? La révolution digitale
restera-t-elle underground ou est-elle déjà dans les mains des firmes ? Autant de questions
auxquels ce livre ne répond pas puisqu’il n’y est question que de publicités imprimées sur
papier.»101

Les agences de publicité ont su évoluer au fil des années pour se doter progressivement de pôle
digital. Les agences ont durant un temps proposé des recommandations basées sur des « stratégies
360° » mixant presse, radio, télévision, affichage, hors média et Internet. Certaines ont déjà
abandonné cette communication à 360°, par manque d’efficacité ou de pertinence, pour se
concentrer sur le digital ou le conversationnel dès l’arrivée des réseaux sociaux. Les agences dites
« conversationnelles » sont des agences spécialisées dans le conseil en communication, sur les
réseaux sociaux ou les sites des marques. Leur expertise est donc bien différente de celle de la
publicité classique. Cependant, les recommandations stratégiques « digitales » ou « sociales » se
doivent d’être en cohérence avec le positionnement des stratégies de communication globales
mises en place par les agences de publicité. De manière générale, les agences de publicité et de
conseils en communication se sont donc intéressées au brand content, favorisé par l’émergence
d’Internet, dont l’advergaming est l’un des meilleurs exemples.



100
      Merde à Internet. Dix ans de publicité sur papier de l’agence Leg, (Agence LEG, 2012).
101
      Ibid, 4e de couverture.

                                                                                                    29
C) Le brand content comme opportunité
      1. Brand content : définition et exemples

L’avènement du brand content

Afin de définir la notion de « brand content » ou contenu de marque, il faut signaler que nous nous
appuierons essentiellement sur l’ouvrage déjà évoqué en référence, de Matthieu Guével et Daniel
Bô : Brand Content, Comment les marques se transforment en médias102.

Dans une société marquée par la profusion publicitaire, les marques connaissent aujourd’hui des
difficultés pour transmettre leur message publicitaire. Or communiquer, c’est transmettre un
message et « de fait, la publicité fut d’abord et essentiellement l’art de transmettre un message. »
103
      Les marques doivent alors faire face à ce problème : « les individus ne cherchent pas à s’exposer
à des messages. C’est au messager d’aller à l’encontre de son destinataire pas l’inverse. Il faut donc
au préalable, réussir à créer le contact et capter l’attention au bon endroit, au bon moment. »104
Nous revenons encore une fois à la logique d’attention publicitaire mentionnée plus haut, comment
les marques peuvent-elles alors résoudre cette équation et réussir à transmettre leur message ?
Comme nous l’avons vu précédemment, les différentes mutations médiatiques que sont la
fragmentation de l’audience, la prise de pouvoir du consommateur-spectateur, la démocratisation
du statut d’éditeur et l’hyper-sollicitation des spectateurs, ont participé à la baisse de l’attention
publicitaire et à la difficulté des marques de capter leur audience. L’internaute change de statut :
du stade de consommateurs, il est passé à spectateur ; de cible, il est devenu public. Public et cible
sont deux entités distinctes 105: à travers l’advergaming et le brand content, la marque s’adresse à
la partie conjointe de ces deux entités. Lorsqu’il s’agit de brand content, il est donc préférable de
parler de spectateurs ou de public plutôt que de consommateurs puisque la marque propose un
contenu et non pas un produit ou une publicité. « Il devient essentiel d’offrir un contenu auquel les
spectateurs accepteront de s’exposer d’eux-mêmes. Sans minimiser le fait que les marques ont
depuis longtemps cherché à concevoir des publicités suffisamment attractives pour émerger dans
les tunnels de publicités télé ou presse, cet impératif se pose aujourd’hui à un niveau nettement
plus élevé. »106 C’est dans ce contexte qu’est apparu le brand content, afin d’offrir une opportunité


102
    Source : Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod)
103
    Ibid, p. 16
104
    Ibid, p. 16
105
    Cf annexe : Schéma : public et cible, deux entités distinctes.
106
    Source : p. 34, Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod)

                                                                                                                                            30
aux marques de renouveler leur communication, une véritable alternative aux différentes solutions
proposées jusqu’alors pour s’associer à des contenus comme le sponsoring, le placement de
produit, ou encore l’in-game advertising, la publicité dans les jeux vidéo.

Une définition du brand content

Donnons maintenant une définition complète du brand content. Il s’agit d’un « contenu éditorial
créé ou largement influencé par une marque. La marque ne se contente pas de parrainer ou
d’utiliser un contenu préexistant, mais assume jusqu’au bout un vrai rôle d’éditeur, finance et
fabrique un contenu souvent à partir de son propre fonds. Les marques dont l’offre de brand
content est suffisamment étoffée deviennent des marques médias. »107 Le contenu est donc au
service de la marque, entièrement, et à l’attention du spectateur, uniquement. La notion de
marque média mérite elle aussi d’être définie. Une marque média est une « marque ayant
totalement assumé et investi le statut d’éditeur, au point de proposer une offre de contenus
suffisamment étoffée pour exister de façon autonome, voire d’être commercialisée comme un
produit à part entière. »108

Un parfait exemple de marque média peut être celui de la marque Red Bull dont le contenu de la
chaîne Youtube109, renouvelé et renfloué plusieurs fois par jour de vidéos de sports extrêmes
tournées à travers le monde, est d’une qualité égale si ce n’est supérieure, à celle d’une chaîne de
télévision. Et sur ce point les internautes ne s’y trompent pas, la chaîne Youtube de Red Bull
compte ainsi plus de 500 000 abonnés et 315 millions de vues, des indicateurs de performance très
largement au-dessus de la moyenne.

Si le contenu est exclusivement à l’attention du consommateur-spectateur, c’est aussi pour lui offrir
une véritable contrepartie, une contrepartie au fait d’être exposé au message de la marque. On
peut ainsi évoquer les notions de don et de contre-don sous-jacentes au contenu de marque : la
marque fait un don de contenu en vue d’un achat futur éventuel (contre-don du consommateur).
« La communication doit s’inviter chez le spectateur comme une expérience riche, avec un bénéfice
immédiat. »110 Divertir, faire vivre une véritable expérience au spectateur, proposer un contenu
intéressant plutôt qu’intéressé, telles sont les clés du brand content. Selon les auteurs, le contenu


107
    Ibid, Définition du brand content, p. 182
108
    Ibid, Définition de marque média, p. 184
109
    Chaîne Youtube de Redbull Energy Drink, consulté le 4 juin 2012. http://www.youtube.com/redbull
110
    Source : p. 38, Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod)

                                                                                                                                            31
est d’ailleurs un « objet culturel autosuffisant et autonome. »111 Il n’a pas besoin d’être affilié à une
marque pour se promouvoir, bien au contraire. C’est son indépendance qui peut lui garantir un
certain succès sur la toile. On peut prendre l’exemple de BNP Paribas avec la série « Les Colocs »
diffusées sur Dailymotion qui a connu deux saisons et compte près de 4 millions de vues112.

Après avoir analysé les notions de brand content, de marques média et de contenus, intéressons-
nous maintenant à celle de « public ». « Le public est un groupe autonome », il ne s’agit pas
forcément de consommateurs. Le public lecteur du magazine Colors de Benetton n’est pas
forcément acheteur de la marque. « Le public est une collectivité sociale dont les membres
interagissent entre eux. »113 Les membres d’un public constituent potentiellement une
communauté, où ils peuvent partager ou échanger. « Les personnes qui composent un public
débattent, échangent, argumentent et discutent entre eux d’un objet. »114 Dans ce sens, la marque
met à disposition du public un objet, un contenu, qu’il peut à son tour partager sur cet « espace
public » qu’est Internet. L’occasion pour nous de reprendre la définition d’espace public de Jürgen
Habermas : « processus au cours duquel le public constitué d'individus faisant usage de leur raison
s'approprie la sphère publique contrôlée par l'autorité et la transforme en une sphère où la critique
s'exerce contre le pouvoir de l'État »115. Une définition toujours d’actualité… Rendre publique un
contenu sur Internet renvoie donc à cette notion d’espace public, où l’individu est libre de partager
un message, d’échanger, de discuter sur un contenu, de manière indépendante de la marque (sans
que celle-ci ne lui ait imposé cette action).

De plus, la démocratisation de l’édition évoquée par Daniel Bô et Matthieu Guével, permise par
l’émergence du web, offre l’opportunité à tous les internautes de créer du contenu, fabriquer son
site et court-circuiter en partie les médias traditionnels. On constate d’ailleurs l’émergence
d’internautes « stars » sur la toile, qui ont su gagner en notoriété uniquement grâce au contenu
proposé au public. C’est le cas par exemple de Cyprien (Monsieur Dream) 116 ou Norman fait des
vidéos117. Ces jeunes comiques ont été révélés grâce à leurs vidéos sur les plateformes de partage
Youtube ou Dailymotion, ils comptent des milliers d’abonnés à leurs chaînes respectives et
totalisent des millions de vues à chaque nouvelle vidéo postée. Certains ont d’ailleurs réalisé des

111
    Ibid, p. 54
112
    Chaîne Dailymotion des Colocs, consulté le 4 juin 2012. http://www.dailymotion.com/mescolocs
113
    Source : Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, p. 69, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod)
114
    Ibid, p. 70
115
    L'espace public : archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise, Jürgen Habermas (Payot - 1962).
116
    Chaîne Youtube de Cyprien (Monsieur Dream), consulté le 4 juin 2012 : http://www.youtube.com/user/MonsieurDream
117
    Chaîne Youtube de Norman, consulté le 4 juin 2012 : http://www.youtube.com/user/NormanFaitDesVideos

                                                                                                                                            32
partenariats avec des marques, comme Norman avec Crunch, qui a fait l’objet d’une web-série de 8
épisodes sur Youtube, où le jeune comique était envoyé selon les choix des internautes dans
diverses destinations pour la campagne digitale « Sors Norman de sa chambre »118 (faisant ainsi
référence aux vidéos amateurs filmées dans sa chambre).

      2. Pourquoi les marques optent pour le brand content ?

À la question « Pourquoi la marque devrait-elle opter pour le brand content ?" Paul Veyne répond
ceci : « Pour des marques en quête de reconnaissance ou qui voient leur légitimité menacée, le
contenu éditorial et le financement de divertissement collectif constituent des opportunités à
saisir. »119

Cette analyse anticipait les opportunités qu’allaient connaître les marques avec l’émergence du
« réseau des réseaux ». L’occasion pour elles de soigner leur image, et de dépasser le statut de
simple marchand : « la marque passe du statut de vendeur au statut d’agent culturel à part entière,
dont les intérêts ne sont pas uniquement commerciaux, et avec qui il devient possible de nouer des
relations plus complexes. »120

Les marques peuvent aussi profiter du brand content pour soigner leur identité grâce au contenu.
Cartier nous expose ainsi ses valeurs dans un film intitulé Odyssey et réalisé par Bruno Aveillan,
révélant son identité de marque dans un court métrage de qualité de 3 min 30 à l’occasion du 165 e
anniversaire de la marque121.

Dans un autre genre cette fois, les marques peuvent présenter un contenu divertissant, dont le
principal objectif est un objectif d’image : renforcer ou créer de la notoriété. La marque de
chaussures et de mode Converse a notamment financé la création de morceaux et clips musicaux
avec des stars comme Pharell Williams (NERD), Julian Casablancas (The Strokes) et Santogold. Ces
trois artistes ont collaboré ensemble lors de la création du titre original « My Drive Thru » produit
par NERD en 2008122. Converse a poursuivi cet effort de création chaque année, renouvelant les
partenariats avec les stars d’une industrie musicale en crise, proposant alors une solution



118
    Chaîne Youtube de Crunch France, consulté le 13 juillet 2012 : http://www.youtube.com/user/CrunchFrance
119
   Le Pain et le Cirque, sociologie historique d’un pluralisme politique, Paul Veyne (Editions du Seuil, 1976)
120
    Source : Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, p. 96, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod)
121
    Lancé le 2 mars 2012 sur le site http://www.odyssee.cartier.fr
122
    Vidéo My Drive Thru sur Youtube, produite par NERD, postée le 9 juillet 2008, consultée le 15 août 2012.
http://www.youtube.com/watch?v=GPZ5fnYFI4Q

                                                                                                                                            33
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Advergaming : une stratégie efficace

  • 1. UNIVERSITE DE PARIS IV – SORBONNE CELSA École des hautes études en sciences de l’information et de la communication MASTER 2e année Mention : Information et Communication Spécialité : Marketing, Publicité et Communication Option : Stratégie de Marque et Branding L’advergaming : au-delà de la gamification, un véritable dispositif interactif au service d’une stratégie de marque durable. Préparé sous la direction du Professeur Véronique Richard Nom, Prénom : Mougenot Mickaël Promotion : 2011-2012 Soutenu le : 16 novembre 2012 Note du mémoire : Mention : 1
  • 2. Remerciements Je tiens tout d’abord à remercier mon rapporteur universitaire, Stéphanie Kunert, pour ses conseils et ses corrections lors de la préparation de ce mémoire. Je remercie également mon rapporteur professionnel, Cyril Rimbaud, qui a pris le temps de m’accueillir au sein de son entreprise pour m’orienter dans mes recherches et la rédaction de ce mémoire. Je remercie Etienne Candel, Maître de Conférence au CELSA, pour m’avoir donné l’idée du sujet lors de son cours sur l’interaction et l’interactivité. Mes remerciements vont aussi à Ismaël Sow, ancien étudiant du CELSA, qui a accepté de m’envoyer son mémoire de fin d’études afin que je poursuive ses recherches. Je tenais également à adresser mes remerciements à Eugène Ernoult, fondateur de Babble Planet, Olivier Gatelmand, fondateur de Flagfriend, et Nicolas Rodoroff, fondateur de Pizza Driver, pour avoir accepté de répondre à mes questions lors d’entretiens exploratoires. Enfin mes derniers remerciements vont à Léa Besson qui m’a accompagné et supporté tout au long lors de la rédaction de ce mémoire, de la première à la dernière ligne. 2
  • 3. Sommaire 1. Le brand content en ligne pour répondre à la crise des marques et de la publicité ............................................................................................................14 A) Une crise de la publicité................................................................................................ 14 1. La publicité aujourd’hui ..................................................................................................... 14 2. Le déclin publicitaire .......................................................................................................... 16 3. L’attention publicitaire au cœur du débat ........................................................................ 21 B) Une évolution « digitale »............................................................................................. 26 1. A l’origine, des valeurs de liberté et indépendance du web ............................................. 26 2. L’évolution des agences de publicité................................................................................. 29 C) Le brand content comme opportunité........................................................................... 30 1. Brand content : définition et exemples ............................................................................. 30 2. Pourquoi les marques optent pour le brand content ? ..................................................... 33 3. Quels avantages par rapport à la publicité classique ? ..................................................... 34 2. L’advergaming, un dispositif interactif qui participe à une création de valeur durable pour les marques. .................................................................................37 A) Le jeu vidéo et la publicité ............................................................................................ 37 1. Histoire du jeu vidéo : De Pong à Angry Birds ................................................................... 37 2. De la publicité dans le jeu vidéo ........................................................................................ 45 3. Pourquoi le marketing investit le jeu vidéo....................................................................... 48 B) L’advergaming, vers une expérience de marque différente et participative ................... 50 1. Gamification : analyse d’une tendance ............................................................................. 50 2. Emergence de la gamification : La réalité est cassée, les jeux peuvent la réparer. ......... 53 3. Advergaming : définition et enjeux ................................................................................... 58 3
  • 4. C) De l’interactivité dans l’advergame .............................................................................. 61 1. Quelle représentation de l’interactivité dans l’advergame ? ........................................... 61 2. Approche user centric : Quelle place pour le joueur dans ce dispositif ? ......................... 64 3. Approche brand centric : quelle place pour la marque dans ce dispositif ? ..................... 67 3e partie : Recommandations : L’advergaming comme outil d’une stratégie digitale globale efficace et durable. ................................................................................69 A) De la nécessité de créer des jeux de qualité .................................................................. 69 1. Publicité et jeux-vidéo ne font pas forcément bon ménage ............................................. 69 2. Culture vidéo-ludique : l’exigence des joueurs ................................................................. 71 3. La qualité du contenu : la condition sine qua non pour réussir ........................................ 72 A) De la nécessité de rester cohérent ................................................................................ 74 1. L’advergame, représentant des valeurs de marque ......................................................... 74 2. Le game design au service des codes de la marque (logo, nom, charte graphique) ........ 76 3. Limites de l’advergaming .................................................................................................. 77 B) L’advergaming au centre d’une stratégie digitale durable ............................................. 78 1. Le risque du « coup de pub » inefficace et destructeur .................................................... 78 2. La solution d’une communication de long terme ............................................................. 80 4
  • 5. Introduction Paradise City La course bat son plein sous le soleil éclatant de Paradise City. Au volant de votre Ferrari Enzo vous semez vos concurrents un par un à plus de 300 km/h, enchaînant les dérapages contrôlés et la conduite à contre-sens tout en évitant les accidents en pagaille. Pas de doute nous sommes bien dans un jeu-vidéo, le jeu de course d’arcade Burnout Paradise1. La première place se profile alors qu’il vous faut encore aborder un dernier virage à toute vitesse : accélération, frein à main, puis nouvelle accélération pour finir en beauté, la victoire ne semble plus pouvoir vous échapper. Alors que vous apercevez la ligne d’arrivée au loin au fond de cette ligne droite, un détail attire votre attention dans le décor : une affiche publicitaire pour Barack Obama ! Le message « Early Voting has begun. Voteforchange.com » est soutenu par la mention « Paid for by Obama for President »2. Cette publicité a été largement commentée et reprise sur Internet et les autres médias lors de la campagne présidentielle américaine en 2008. Il s’agit en effet de la première publicité pour une personnalité politique dans un jeu vidéo. Cette forme de publicité appelée « in-game advertising » est définie de la manière suivante par Ismaël Sow, auteur du mémoire La Publicité dans les jeux vidéo : révolution ou impasse ? : « l’in-game advertising correspond principalement à l’insertion de bannières publicitaires dans les jeux. Ce type de publicité est particulièrement présent dans les jeux de simulation sportive »3. La publicité in-game désigne en effet les encarts publicitaires statiques (inamovibles, inchangeables) ou dynamiques (évolutifs, mises à jour régulièrement) présents dans certains jeux, considérés alors comme supports de communication par les annonceurs. Ainsi cette forme de publicité interroge sur l’hybridité du jeu vidéo, entre contenu et média, entre dispositif ludique et support de communication. Nous tenterons ici de poursuivre les recherches d’Ismaël Sow autour du jeu-vidéo et de la publicité, dont la problématique de mémoire était : « Pourquoi un média tel que le jeu-vidéo, avec une si grande audience, et dont les avantages pour la publicité ont été tant vantés, demeure malgré tout un canal publicitaire mineur ? ». 1 Burnout Paradise, Sortie le 24 janvier 2008 en France, Editeur Electronic Arts, Développeur Criterion Studios. 2 Cf annexe 1 : Affiche publicitaire in-game « Barack Obama », dans Burnout Paradise. 3 Mémoire « La Publicité dans les jeux vidéo : révolution ou impasse ? » de Ismaël Sow (p. 63) – Master 2 Professionnel Option CTN, année 2010-2011 - CELSA Paris-Sorbonne – Ecole des Mines d’Alès 5
  • 6. Selon moi, et suite aux conclusions de ce mémoire, il était intéressant de se pencher sur un autre cas de publicité innovante, déjà évoquée par Ismaël Sow, celui de l’advergaming. Donnons-lui tout de suite une première définition afin de poser les bases de ce mémoire : il s’agit d’un néologisme, contraction d’« advertising » et « gaming », qui désigne un jeu vidéo à vocation publicitaire, dont le but est de promouvoir une marque ou un produit. Il peut prendre différentes formes, que ce soit un jeu en Flash sur Internet, une application pour mobile ou un jeu vidéo pour console. Mais alors, quelles différences entre advergaming et publicité in-game ? Et quelles conséquences sur l’efficacité publicitaire ? Les advergames permettent surtout « de rendre la marque accessible en la transformant en objet d’interactions » selon Olivier Bertin, auteur de l’article Place au Jeu pour Influencia4. Considérés comme des « sources de nouvelles expériences ludiques au profit d’une immersion originale dans l’univers de la marque. »5, les advergames remettent en cause le modèle classique de la communication, et permettent une nouvelle alternative aux publicités traditionnelles en manque d’efficacité. Si la marque devient « objet d’interactions », il nous reste à définir cette notion, qui serait au cœur de la stratégie de marque lorsqu’elle fait appel à l’advergaming. L’interaction suppose un échange entre deux éléments au sein d’un système, il s’agit d’une action réciproque comme le définit Edgar Morin dans La Nature de la Nature : « Les interactions sont des actions réciproques modifiant le comportement ou la nature des éléments, corps, objets, phénomènes en présence ou en influence. »6 De même que l’interaction, l’interactivité est un terme abondamment repris aujourd’hui dans les médias. Ce sont des objets triviaux, largement utilisés et souvent réappropriés, dont la signification évolue. Nous tâcherons donc dans ce mémoire de définir en quoi l’advergaming est un dispositif interactif, car contrairement à la publicité in-game, l’advergaming mise sur l’interactivité entre l’utilisateur et la marque, tout en se posant comme dispositif de communication pour l’annonceur, ce que ne peut faire la publicité in-game, statique et fidèle au système archaïque de l’achat d’espace publicitaire, souvent inefficace auprès des joueurs. Quels sont alors les rapports entre jeux vidéo et publicité ? Comment le jeu vidéo influence-t-il la publicité et inversement ? Afin de répondre à ces questions nous nous appuierons notamment sur les études d’Etienne Candel, Maître de Conférence au CELSA, dont les travaux sur l’interactivité en ligne nous permettront de 4 Article Place au Jeu ! sur Influencia.net, consulté le 10 avril 2012. Lien : http://www.influenciatendance.net/brandcontent/index.php?page=18# 5 Ibid 6 La Nature de la Nature, Edgar Morin, 1977, p. 51 (Editions Seuil). 6
  • 7. mieux définir cette notion. Il est également nécessaire de préciser que nous aborderons dans ce mémoire de nombreux advergames en ligne, et que nous chercherons à analyser uniquement les dispositifs présents sur Internet ou sur mobile afin de délimiter notre sujet d’étude. En effet, le choix de ce mémoire repose sur un constat simple : de plus en plus de marques proposent des jeux vidéo publicitaires en ligne ou sur mobile, il semblait indispensable de nous attarder sur ce phénomène en plein essor. « The game layer on top of the world » Avant d’aborder ces questions primordiales, revenons un instant sur une tendance de fond qui explique en partie l’avènement du jeu vidéo comme outil marketing. En effet, le jeu vidéo a su évoluer, se renouveler et surmonter les crises pour aujourd’hui arriver à son apogée. De la création de Pong en 1972, tout premier jeu sur borne d’arcade à connaître un succès populaire, au lancement de Kinect sur la console Xbox 360 de Microsoft en 2010 permettant de jouer sans manette, l’industrie vidéo-ludique a su s’imposer comme le premier marché de produits culturels dans le monde, représentant aujourd’hui plus de 33 milliards d’euros7. Cependant son influence ne s’arrête pas à de simples chiffres et autres statistiques montrant que la moyenne d’âge des joueurs est plus élevée qu’on ne le croit et que les femmes sont toutes aussi joueuses que les hommes. Le jeu a investi notre culture, notre mode de vie, mais aussi notre façon de communiquer. Le processus de gamification explique donc en partie l’émergence du jeu comme outil marketing. La gamification est un terme anglais que l’on pourrait traduire par « ludification » en français, mais il manque dans cette traduction l’aspect vidéo-ludique et la notion de « gaming » correspondant à l’action de jouer. Afin de rester cohérent nous utiliserons donc dans ce mémoire uniquement le terme de gamification. Il s’agit du « transfert des mécanismes du jeu vidéo dans la vraie vie, pour la rendre plus ludique, plus acceptable et plus intéressante » selon l’abécédaire du jeu vidéo présent dans la revue Tank intitulée Play Time. Communiquer à l’ère du jeu8. Voici donc un premier élément de définition qui nous permet de mieux cerner notre sujet. Nous irons plus loin dans ce mémoire en nous appuyant notamment sur les recherches d’Olivier Mauco, Docteur en sciences politiques, spécialité jeux vidéo à l’Université Panthéon Sorbonne (Paris I) dont la thèse avait pour sujet : « Jeux vidéo, problèmes publics, régulations privées. »9 La gamification a ainsi permis l’intégration 7 Source : GFK, Magazine Trois Couleurs Hors-série #7 « Games Stories. L’histoire du jeu vidéo » p. 46 (2011 - Editions : MK2 Multimédia) 8 Source : Définition de gamification dans la revue Tank, numéro #1, « Play Time. Communiquer à l’ère du jeu » p. 80 (2012 - Editions : Télémaque) 9 Thèse « Jeux vidéo, problèmes publiques, régulations privées. » d’Olivier Mauco, soutenue le 28 juin 2012 à l’Université Panthéon Sorbonne (Paris I). 7
  • 8. de pratiques propres aux jeux vidéo dans le marketing. En ce sens, gamification et advergaming ne s’opposent pas, ce sont deux notions complémentaires puisque l’advergaming découle de cette invasion du jeu vidéo dans notre quotidien. Lors d’une conférence TED en août 2010, Seth Priebatsch (fondateur de la start-up SCVNGR) évoque la gamification lors d’un discours intitulé « The game layer on top of the world »10. A juste titre, il explique ainsi dans un premier temps que la dernière décennie était celle du social, et affirme que la prochaine sera celle du jeu. Il énumère notamment les différentes formes que prennent déjà les mécaniques de jeu dans notre vie quotidienne : “There are credit card schemes and airline mile programs, and coupon cards and all these loyalty schemes that actually do use game dynamics and actually are building the game layer.”11 Seth Priebatsch rappelle ensuite que la structure des réseaux sociaux existe déjà, c’est celle de Facebook qui s’est imposée en modèle. Puis il en vient aux caractéristiques de chacune de ces « couches » : “The social layer is all about connections. The game layer is all about influence.”12 Selon lui, l’utilisation des mécaniques de jeu serait un moyen très efficace d’influencer notre comportement : “It’s actually about using dynamics, using forces, to influence the behavior of where you are, what you do there, how you do it.”13 Et la couche ludique, la gamification, pourrait être selon lui plus impactante que la couche sociale qui a pris place ces dernières années… Autre point, il est nécessaire de différencier l’advergame du serious game, afin de délimiter une nouvelle fois le sujet d’étude de ce mémoire. Un serious game est un logiciel qui combine une intention sérieuse avec des ressorts ludiques. Ses objectifs peuvent être de type pédagogique, éducatif, informatif, communicationnel ou idéologique, et c’est ici qu’il se différencie de l’advergame qui n’a pas cette dimension pédagogique, et dont les enjeux sont différents. En effet, un advergame a uniquement une valeur communicationnelle et marketing pour la marque qui le conçoit, contrairement au serious game dont l’objectif peut aller plus loin. Dans les deux cas, l’intérêt est de faire vivre une expérience ludique à l’utilisateur, mais l’advergame se contente de cette expérience, alors que le serious game va chercher à apprendre quelque chose, former ou informer l’utilisateur. De plus les serious games s’adressent à une cible bien précise, comme le jeu 10 Traduction : La couche ludique sur le toit du monde, Conférence TedX Boston de Seth Priebatsch, août 2010, visible ici : http://www.ted.com/talks/seth_priebatsch_the_game_layer_on_top_of_the_world.html 11 Traduction : « Il y a déjà des cartes de crédits, des programmes de compagnies aériennes, et des cartes de réduction. Tous ces programmes de fidélité qui utilisent en fait les mécaniques du jeu vidéo et construisent la couche ludique (ou vidéo-ludique) » 12 Traduction : « La couche sociale est faite de connections. La couche ludique se concentre sur l’influence. » 13 Traduction : « Tout renvoie à l’utilisation des dynamiques et des forces, pour influencer où vous êtes, ce que vous faîtes, comment vous le faîtes.» 8
  • 9. en ligne « Défi Ingénieurs »14 lancé par la SNCF pour attirer de nouveaux ingénieurs sur ses lignes. Le budget alloué à un serious game est également souvent supérieur à celui d’un advergame. Par exemple, l’un des plus célèbres serious games intitulé « America’s Army »15 et développé par l’US Army et Ubisoft en 2002, s’est vu attribué un budget de 7 millions de dollars par l’armée américaine. Le but de ce jeu de tir tactique en vue subjective (ou FPS) est d’inciter les citoyens américains à s’enrôler dans les forces armées des Etats-Unis et de soigner l’image de cette institution. Dans ce mémoire, nous nous consacrerons majoritairement à l’advergame, afin de nous concentrer sur sa valeur communicationnelle et les conséquences de son dispositif interactif. « Play Life. Level Up. » Sortie du travail à 18h30. Il fait beau, les terrasses parisiennes sont déjà noires de monde, vous vous dites que ce serait bête de gâcher votre temps libre à regarder la télévision en rentrant dans votre appartement. Vous avez envie de changement, de vous divertir… Curieux, vous jetez un coup d’œil à vos messages/profil Facebook/compte Twitter/compte Pinterest/boîte mail personnelle : rien de très intéressant dans cet univers hyper-connecté, sauf peut-être un tweet sur le réseau qui gazouille. Le message est plein d’enthousiasme : « Fini le travail ! Un petit tour sur Onefeat16 pour voir quelle nouvelle mission m’attend aujourd’hui. #addiction ». Curieux, vous vous renseignez alors sur « Onefeat » et téléchargez l’application du même nom pour voir de quoi il s’agit. « Play Life. Level Up. » le slogan vous intrigue. Inscription via Twitter : en quelques secondes vous faites déjà partie de ce nouveau réseau. Un message d’accueil apparaît : « Welcome to your life. The best adventure ever. »17 Le principe est simple : « Onefeat is a game where users complete missions by uploading pictures »18 nous indique le premier écran après inscription. Onefeat chercherait donc à faire entrer le jeu dans notre vie quotidienne ? Vous devez alors accepter une première mission, à choisir parmi les suivantes : « Aller au musée et aimer ça », « Avoir sa photo dans le journal » ou encore « Boire un cocktail dans un bar ». Certaines missions semblent plus abordables que d’autres… En acceptant l’une de ces missions vous cumulez des points pour accéder à un niveau supérieur, le fameux « level up » des jeux vidéo. Pour réussir une mission, il faut bien sûr le prouver en téléchargeant une photo de vous en action. Certaines missions valent plus de points, comme « Découvrir un gisement de lave volcanique », mais c’est à vous de choisir quelles missions vous 14 Défi Ingénieurs, développé par TBWA Paris et SNCF, sorti le 26 septembre 2012. Consulté le 30 septembre 2012 : http://defi-ingenieurs-sncf.com/ 15 America’s Army, développé par US Army et Ubisoft, sorti le 4 juillet 2002 sur le site http://www.americasarmy.com/ et consulté le 10 juin 2012. 16 Application mobile Onefeat, développé par Onefeat, disponible sur Itunes depuis 2011. http://onefeat.com/ 17 Traduction : « Bienvenue dans votre vie. La meilleure aventure qui soit. » 18 Traduction : « Onefeat est un jeu où les utilisateurs réussissent des missions en téléchargeant des images. » 9
  • 10. acceptez. L’application vise donc à influencer nos comportements au quotidien, la vie serait donc un jeu ? Gabe Zichermann, co-auteur du livre Game-Based Marketing avec Joseph Lindler, résume ainsi l’influence des jeux vidéo sur le marketing : « In order to compete with games, marketing must become a game »19. Le marketing devrait donc s’emparer de la gamification pour perdurer. La publicité et le marketing ont toujours su refléter la société et s’en inspirer pour mieux influencer le consommateur, c’est encore le cas aujourd’hui avec l’extension des mécaniques de jeu au marketing. La démocratisation des jeux vidéo y est-elle pour quelque chose ? Le grand nombre de jeux disponibles sur mobile ou en ligne et accessibles au plus grand nombre ont certainement aidé le jeu à s’imposer dans la culture populaire, mais nous verrons par la suite qu’il ne s’agit pas seulement de démocratisation, mais aussi et surtout d’un besoin d’interactivité auquel répond le jeu vidéo. « Je n’ai de cesse de souligner combien l’interactivité est la force des jeux vidéo. »20 rappelle Hideo Kojima, l’un des plus influents et des plus grands créateurs de jeu-vidéo, à qui l’on doit notamment la saga des Metal Gear. Peu connu du grand public, voici comment le qualifient Jean-Samuel Kriegk et Jean-Jacques Launier, auteurs du livre Art Ludique : « À la fois réalisateur, producteur et scénariste, Hideo Kojima est sans doute l’un des créateurs les plus perfectionnistes et les plus respectés du jeu vidéo. »21 Ce dernier est ainsi bien placé pour pouvoir exprimer un constat simple : l’interactivité est un corollaire du jeu vidéo. Comment cette interactivité est-elle perçue dans l’advergaming ? En quoi participe-t-elle au processus de communication ? C’est de ce constat et à partir de l’ensemble de ces questions de départ que nous avons décidé de définir la problématique suivante : Dans quelle mesure le dispositif interactif qu’est l’advergaming participe-t-il à une stratégie de marque efficace ? Afin de répondre à cette problématique, nous nous appuierons sur un corpus de jeux publicitaires variés, faisant appel à différentes fonctionnalités du Web et proposés sur différentes plateformes. Commençons par les advergames, ici classés en trois catégories bien distinctes. 19 Source : Introduction, p.6, Game-Based Marketing, Gabe Zichermann et Joseph Lindler (2008 – Editions : Wiley). Traduction : « Afin de concurrencer les jeux vidéo, le marketing doit devenir un jeu » 20 Hideo Kojima, le 11 juin 2010, Article « Hideo Kojima : L’interview à l’écrit. Tout savoir sur MGS Peace Walker. » sur Gameblog.fr, consulté le 12 avril 2012. http://www.gameblog.fr/dossier.php?id_dossier=178&page=3 21 Art Ludique, p.228, de Jean-Jacques Launier et Jean-Samuel Kriegk (2011 – Editions : Sonatine) 10
  • 11. Les trois premiers sont à classer dans la catégorie des advergames en ligne : Magnum Pleasure Hunt22 et Magnum Pleasure Hunt 223 se présentent sous forme de mini-sites où l’on retrouve ces jeux originaux lancés respectivement en mai 2011 et avril 2012 par la marque de glace Magnum du groupe Unilever. La marque Puma propose quant à elle un jeu en ligne Run Puma Run24 qui fait appel à la nostalgie des joueurs avec un jeu 8-bit qui rappelle les célèbres jeux sur bornes d’arcade des années 1980. La seconde catégorie de ce corpus est l’advergame social. Il s’agit de jeux publicitaires faisant appel à des fonctionnalités de réseaux sociaux comme Facebook ou Twitter : l’application Mini-Maps25 sur Facebook développé par le constructeur automobile Mini Cooper et Twitter Scrabble26, un jeu original utilisant de manière intelligente les caractéristiques du réseau pour promouvoir une nouvelle version du Scrabble. Les advergames sur mobile représentent la dernière catégorie de notre corpus : La Chuuute27 et La Chuuute sur Mer28 proposée par Oasis reprend les mécanismes de Doodle Jump, l’une des applications les plus téléchargées sur smartphone. Ce corpus est également composé de serious games comme America’s Army29 dont le but est de recruter de nouveaux militaires dans l’armée américaine. Défi Ingénieurs30 de la SNCF permet quant à lui de recruter de nouveaux ingénieurs. De plus, trois autres jeux de ce corpus ont fait l’objet d’entretiens exploratoires31 par l’intermédiaire de leurs créateurs respectifs : Babble Planet32 est un jeu éducatif destiné à apprendre l’anglais aux enfants de 8 à 10 ans. Son fondateur Eugène Ernoult a accepté de répondre 22 Magnum Pleasure Hunt, développé pour Magnum (Unilever) par l’agence Lowe Brindfors et B-Reel, lancé en mai 2011 sur le site http://pleasurehunt.mymagnum.com/, consulté le 12 juillet 2012. 23 Magnum Pleasure Hunt 2, développé pour Magnum (Unilever) par l’agence Lowe Brindfors et B-Reel, lancé en avril 2012 sur le site http://pleasurehunt2.mymagnum.com/, consulté le 12 juillet 2012. 24 Run Puma Run, lancé en juillet 2012 sur le site http://fr.puma.com/runpumarun, consulté le 20 août 2012. 25 Mini Maps, développé par DDB Paris pour Mini France, lancé en juin 2011 sur l’application Facebook https://apps.facebook.com/minimaps/ et consulté le 19 juin 2012. 26 Twitter Scrabble, développé pour Scrabble (Mattel), lancé en juin 2012 sur http://www.twitterscrabble.be/, consulté le 27 août 2012. 27 La Chuuute by Oasis, application mobile éditée par Orangina Schweppes France pour Oasis, disponible sur Itunes et Android Market depuis septembre 2010. 28 La Chuuute sur Mer, application mobile éditée par Orangina Schweppes France pour Oasis, disponible sur Itunes et Android Market depuis juin 2011. 29 America’s Army, développé par US Army et Ubisoft, sorti le 4 juillet 2002 sur le site http://www.americasarmy.com/ et consulté le 10 juin 2012. 30 Défi Ingénieurs, développé par TBWA Paris et SNCF, sorti le 26 septembre 2012. Consulté le 30 septembre 2012 : http://defi-ingenieurs-sncf.com/ 31 Cf annexe 2 : Entretiens exploratoires 32 Babble Planet, serious game développé par The FWA, disponible sur l’App Store depuis mars 2012 et sur le site http://www.babbleplanet.com/fr/, et consulté le 11 juin 2012. 11
  • 12. à mes questions. Flagfriend33 est une plateforme de jeux géolocalisés dont nous détaillerons le concept par l’intermédiaire d’Olivier Madelmand, son fondateur. Pizza Driver34 est quant à lui un jeu mobile innovant qui permet de gagner un produit réel, une pizza, au joueur qui aura réalisé la meilleure performance sur un jeu bien virtuel. Ces entretiens exploratoires concernent donc un serious game, un jeu de géolocalisation et un jeu mobile. Ils seront utilisés pour démontrer la portée de la gamification dans notre quotidien et son influence sur l’émergence de l’advergaming. Enfin, le dispositif Tipp-Experience35 mis en place sur Youtube sera mentionné dans ce mémoire et fera l’objet d’une analyse pour l’élaboration de nos recommandations dans la dernière partie de ce mémoire. Outre les entretiens exploratoires et l’analyse des différents jeux de ce corpus, la méthodologie de ce mémoire repose sur une analyse sémantique36 du dispositif interactif qu’est l’advergame Magnum Pleasure Hunt 2 et une large bibliographie composée de livres spécialisés comme Art Ludique de Jean-Jacques Launier et Jean-Samuel Kriegk37, Brand Content de Daniel Bô et Matthieu Guével38, Game-Based Marketing de Gabe Zichermann et Joseph Lindler39, Reality is Broken de Jane McGonigal40 ou de magazines spécialisés comme la revue Tank « Playtime, communiquer à l’ère du jeu »41, le hors-série « Games Stories, L’histoire secrète du jeu vidéo » du magazine Trois Couleurs42. Pour répondre à cette problématique, nous aborderons les 3 hypothèses issues de notre constat. Nous tenterons de confirmer une première hypothèse : Le brand content en ligne propose un nouveau modèle de communication capable de répondre à la crise de la publicité et de participer à une stratégie de marque durable. La publicité classique aujourd’hui rejetée par les consommateurs est en manque d’attention et d’efficacité. L’émergence du web offre une opportunité sans précédent aux marques pour diffuser à leur tour un contenu de qualité, détaché des messages commerciaux relayés dans les autres prises de parole de la marque. Pour confirmer cette hypothèse, nous nous appuierons notamment sur la Société des Consommateurs de Robert 33 Flagfriend, application mobile éditée par Flagtory, disponible sur App Store et Android Market depuis septembre 2011 et sur le site http://www.flagfriend.com/, consulté le 3 septembre 2012. 34 Pizza Driver, application mobile éditée par Krikoff, disponible sur App Store depuis octobre 2012. 35 Vidéo interactive « A hunter shoots a bear » sur la chaîne Youtube TippExperience, diffusée le 25 août 2010, consultée le 27 octobre 2012 : http://www.youtube.com/user/tippexperience 36 Cf annexe 3 : Analyse sémantique de Magnum Pleasure Hunt 2 37 Art Ludique, de Jean-Jacques Launier et Jean-Samuel Kriegk (2011 – Editions : Sonatine) 38 Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod) 39 Game-Based Marketing, Gabe Zichermann et Joseph Lindler (2008 – Editions : Wiley) 40 Reality is broken. Why Games Make Us Better and How They Can Change the World, Jane McGonigal (2010 – Editions : Penguin Press). 41 Tank, numéro #1, « Play Time. Communiquer à l’ère du jeu » (2012 - Editions : Télémaque) 42 Magazine Trois Couleurs, hors-série #7 « Games Stories, L’histoire secrète du jeu vidéo » (2012 – Editions : MK2 Multimédia) 12
  • 13. Rochefort43, afin d’expliquer le déclin publicitaire, puis sur l’ouvrage Brand Content. Comment les marques se transforment en médias signé par Daniel Bô et Matthieu Guével36 pour mieux comprendre l’évolution des contenus de marques sur Internet. Par la suite, nous aborderons une seconde hypothèse tournée sur le cœur du sujet : L’advergaming est un dispositif interactif permettant de créer une relation entre marques et consommateurs. Après avoir revu l’histoire commune du jeu vidéo et de la publicité, à partir d’ouvrage comme Mythologie des Jeux Vidéo de Laurent Trémel et Tony Fortin44 ou du hors-série #7 de Trois Couleurs intitulé « Games Stories. L’histoire secrète du jeu vidéo »40, nous essaierons d’identifier les raisons de son émergence dans la sphère marketing. Les deux principales références bibliographiques concernant la gamification seront Game-based marketing de Gabe Zichermann et Joseph Linder37, ainsi que Reality is broken de Jane McGonigal45. La notion d’interactivité sera abordée à partir des recherches d’Etienne Candel, Maître de Conférence au CELSA, et d’Etienne Armand Amato, Docteur en sciences de l’information et de la communication à l’Université de Paris 8. Une troisième partie sera enfin consacrée aux recommandations dont le but sera de valider la dernière hypothèse : L’advergaming participe à une stratégie de marque efficace et durable, non pas éphémère, par son interactivité et ses capacités communicationnelles. Les recommandations seront axées sur la nécessité de créer des jeux de qualité pour répondre à l’exigence des joueurs internautes, de rester cohérent avec l’ensemble de la stratégie digitale globale de la marque, et d’éviter le risque du coup de pub. 43 La Société des Consommateurs, Robert Rochefort (2001 – Editions Odile Jacob) 44 Mythologie des Jeux Video, Laurent Trémel et Tony Fortin, (2009 - Editions : Cavalier bleu) 45 Reality is broken. Why Games Make Us Better and How They Can Change the World, Jane McGonigal (2010 – Editions : Penguin Press). 13
  • 14. 1. Le brand content en ligne pour répondre à la crise des marques et de la publicité A) Une crise de la publicité Le portrait de la publicité que dresse le journaliste Nick Summers dans Newsweek est sans appel : “Time was, advertising was a relatively simple undertaking: buy some print space and airtime, create the spots and blast them at a captive audience. Today it’s chaos: while passive viewers still exist, mostly we pick and choose what to consume, ignoring ads with a touch of the DVR remote”46. Même s’il faut relativiser cette description chaotique, il faut néanmoins noter qu’elle met le point sur un phénomène qui a considérablement influencé l’évolution de la communication : l’essor du digital. L’arrivée du web a d’autant plus bouleversé la publicité qu’elle était déjà en crise, critiquée de toutes parts, annonçant déjà le désenchantement qui était en train de se produire. 1. La publicité aujourd’hui Une industrie toujours en forme malgré la crise ? Rentrons tout de suite dans le vif du sujet : « The global advertising industry is estimated at 500$ billion »47 reporte Nick Summers dans Newsweek. La publicité se porte plutôt bien, malgré un ralentissement de sa croissance et un exercice 2008-2009 plutôt négatif. Selon Zenith Optimedia, le marché publicitaire mondial devrait croître de 4,3% en 2012 pour atteindre plus exactement 502 milliards de dollars. Les prévisions Monde pour 2013 et 2014 s’établissent respectivement à +5,3% et +6,1%, ce qui annonce encore de belles années à l’industrie publicitaire48. Ces chiffres sont cependant à relativiser, tout d’abord car ces estimations ont été revues à la baisse par Zenith Optimedia, qui avait dans un premier temps annoncé une hausse du marché mondial de 4,8%. La crise de la Zone Euro ayant freiné les investissements publicitaires pour 2012, les prévisions ont été moins optimistes. Ensuite, il faut noter que le marché est essentiellement tiré par les pays émergents : « 60% de la croissance totale en provenance des pays émergents »49. En effet, le Brésil, la Chine, la Russie ou l’Inde tirent largement le marché vers le haut, et représentent à eux 46 Source : Article “Click this ad already!” de Nick Summers, p. 45, Newsweek, numéro du 26 mars et 2 avril 2012 (Editions : Daily Beast Company). Traduction : « Il fut un temps où il la publicité était une entreprise relativement simple : vous achetiez un espace presse et du temps d’antenne, vous créiez des spots et l’exposiez à un public captif. Aujourd’hui c’est le chaos : alors que les spectateurs passifs existent toujours, la plupart d’entre nous sélectionne et choisisse quoi consommer, ignorant les publicités avec une touche de télécommande. » 47 Source : Ibid. Traduction : « L’industrie publicitaire mondiale est estimée à 500 milliards de dollars. » 48 Source : Article « Le marché publicitaire devrait croître moins vite que prévu en 2012 » sur lexpansion.com le 19 juin 2012, consulté le 21 juin 2012. http://lexpansion.lexpress.fr/economie/le-marche-publiciatire-devrait-croitre-moins-vite-que-prevu-en-2012_304882.html 49 Ibid. 14
  • 15. seuls 35% de la croissance mondiale. Ce qui semble logique lorsque l’on sait la croissance économique de ces pays. Si l’on s’attarde cette fois sur les chiffres du marché publicitaire français, ils sont certes en hausse, mais bien en deçà des estimations annoncées par Zenith Optimedia au niveau mondial. Prenons ainsi les données de l’IREP (Institut de Recherches et d’Etudes Publicitaires) : le marché publicitaire français a augmenté de 1,9% en 2011 pour s’établir à 31,4 milliards d’euros50. Le premier trimestre 2012 est du même ordre selon le baromètre du marché publicitaire du CNC (Centre National du Cinéma et l’image animée) : « Au premier trimestre 2012, le marché publicitaire progresse de 2,8 % à 6 464,4 M€ »51. Certes le marché français est en hausse mais rappelons qu’il a subi une forte baisse de -8,6% en 2009 selon l’IREP52. Les dépenses publicitaires avaient ainsi subi de plein fouet les coupes budgétaires mises en place par les annonceurs pendant la crise économique et financière de 2009. Le marché français redémarre donc doucement après une année noire, mais sa croissance reste inférieure à celle des pays émergents évoqués plus haut. La France n’est donc pas épargnée par la crise de la publicité, mais plus globalement, ce n’est pas seulement l’économie qui est en cause. Le marché publicitaire se répartit de manière inégale sur différents supports médiatiques ou formes publicitaires : télévision, presse, radio, internet, affichage, cinéma, marketing direct, promotions etc… Selon l’IREP, le premier support privilégié par les annonceurs en 2011 reste le marketing direct avec près de 30% des dépenses en communication (29,2% plus exactement). Par marketing direct on entend mailing, imprimés sans adresse et autres éditions publicitaires. Cependant, l’évolution technologique pousse à une réduction de ces imprimés, par souci d’économie de papier d’une part, et pour son côté peu pratique d’autre part. L’e-mailing serait alors envisagé comme un moyen de remplacement tout désigné. L’email n’est pas un moyen de substitution au prospectus, mais on peut constater que les dépenses en communication sur Internet ont encore fortement augmenté en 2011 avec une hausse de 10,6% par rapport à 2010. Cette hausse s’explique notamment par l’augmentation des e-mailings mais surtout par la prise en compte des publicités sur les réseaux sociaux dans cette étude. Sans surprise, Internet continue sa forte croissance et le digital prend une place de plus en plus importante parmi les dépenses en communication. Avec une part de marché de 5,3%, Internet reste encore en dessous des médias classiques que sont la télévision ou la presse, 50 Source : « Le marché publicitaire en 2011 » sur irep.asso.fr (Institut de Recherches et d’Etudes Publicitaires), le 15 mars 2012, consulté le 21 juin 2012. http://www.irep.asso.fr/actualites.php?id=124 51 Source : « Baromètre du marché publicitaire : mars 2012 » sur cnc.fr, (Centre National du Cinéma et de l’Image animée), le 26 avril 2012, consulté le 21 juin 2012. http://www.cnc.fr/web/fr/barometre-marche-publicitaire/-/ressources/1706821 52 Source : « Le marché publicitaire français en 2011 » sur irep.asso.fr (Institut de Recherches et d’Etudes Publicitaires), consulté le 21 juin 2012. http://www.irep.asso.fr/marche-publicitaire-chiffres-annuels.php 15
  • 16. mais représente presque le double des parts de marché de la radio qui représente 2,8% des dépenses en communication des annonceurs. La transition vers le digital est donc plus lente que prévue et certains annonceurs restent encore frileux à l’idée d’investir ce média. Il y a bien une crise de la publicité, en manque d’investissements et d’efficacité, mais aussi et surtout en pleine transition vers le digital, les nouvelles pratiques de communication qui découle des évolutions technologiques. Cependant, nous allons voir que la publicité subit également une crise de confiance, menant à une publiphobie ambiante, remettant en cause son modèle. 2. Le déclin publicitaire Une publiphobie ambiante Dans son livre intitulé La Communication Transformative, Laurent Habib, ancien Directeur Général du groupe Havas, revient ironiquement sur l’idée que « la publicité est jugée moralement coupable de tous les maux de la société »53. L’étude « Publicité et Société 2011 » menée chaque année par TNS Sofres-Australie confirme cette impression en révélant que 81% des Français jugent la publicité envahissante et que 37% sont publiphobes (chiffres en hausse)54. Cette publiphobie ambiante se ressent également à travers les mouvements et organisations anti- pub en France comme les Déboulonneurs, Brigade Anti Pub ou Résistance à l’Agression Publicitaire, omniprésents depuis quelques années. Leurs valeurs sont d’ailleurs régulièrement reprises directement ou indirectement par des artistes ou street-artists qui vont plus loin, comme Pixelator qui recouvre les panneaux publicitaires de New York avec un filtre pixellisant la publicité, rendant l’image poétique, non-agressive et désintéressée55. La publiphobie va de pair avec un autre phénomène jugé inquiétant par Laurent Habib : « Près de la moitié des internautes qui fréquentent assidûment Internet ne perçoivent même plus les bannières publicitaires sur leur écran »56. De nombreux exemples en annexe57 de ce mémoire témoignent de cette publiphobie et prouvent que la publicité a besoin de se renouveler et d’évoluer. Elle a longtemps voulu être considérée comme un art. Aujourd’hui, son détournement et les critiques envers elle sont d’autant plus 53 Source : La Communication Transformative. Pour en finir avec les idées vaines, p. 103, Laurent Habib (2010 – Editions : PUF) 54 Source : Publicité et Société 2011 : Décrochages, étude TNS-Sofres Australie, sur tns-sofres.com le 27 septembre 2011, consulté le 24 juin 2012. http://www.tns-sofres.com/points-de-vue/190E522A5AE444B091DE500B455C83EE.aspx 55 Cf annexe 4 : Pixelator 56 Source : La Communication Transformative. Pour en finir avec les idées vaines, p. 111, Laurent Habib (2010 – Editions : PUF) 57 Cf annexe 5 : Brandalism project & street art 16
  • 17. présents dans la culture artistique moderne, que la publicité ne l’a jamais été. La publiphobie ambiante se ressent ainsi jusque dans les autres domaines, annonçant finalement son déclin. La fin du rêve publicitaire ? « La publicité, c'est l'art des cavernes du XXe siècle » osait commenter Marshall MacLuhan en 1988. Une manière détournée de la considérer comme une forme d'art, tout en critiquant sa forme primaire. Nous n'allons pas ici revoir en détail l'histoire de la publicité, mais plutôt nous concentrer sur la « publicité du rêve » (c'est ainsi que nous l’appellerons) qui a officié durant les années 1980-1990. Afin de mieux comprendre cette période, il est tout de même nécessaire de revenir brièvement sur les principales évolutions dans l'histoire de la publicité, telle que nous la connaissons aujourd'hui. Le rêve porté par la publicité durant les années 1980 commence à s'éteindre lentement. Il s'agit là d'ailleurs d'une autre explication de la publiphobie ambiante évoquée plus haut. La publicité a été très décriée pour avoir été excessive dans la représentation de valeurs idéales et superficielles durant les années 1980-1990. Gilles Lipovetsky, auteur de l’Ere du Vide58, reivent dans la revue Médias sur la place de la publicité dans la société en lui admettant un certain pouvoir : « Il est évident que les médias et la publicité véhiculent des normes, en particulier concernant le corps des femmes. Cela a créé un nouveau type de comportement, l’aspiration esthétique. L’image de référence est devenue celle de la jeunesse et du corps svelte. »59 Outre sa faculté à véhiculer des références, la publicité valorise le consommateur autant qu’elle le fait rêver dans une ère où l’individualisme est roi et le narcissisme la norme. Le rêve publicitaire s'est éteint en même temps qu'est apparu le sentiment de révolte des consommateurs, qui s'est ensuite traduit un peu plus tard par une volonté de transparence et de rassurance des marques pour répondre aux attentes des consommateurs. La publicité ne devait plus vendre du rêve mais rassurer : « Assailli par des inquiétudes de toutes sortes, l’individu cherche dorénavant à être rassuré. Cela entraîne des changements dans ses choix de consommateur. Tel est le basculement des années 1990. Quel contraste avec le temps des années 1980 au cours desquelles la consommation exaltait la toute-puissance de l’individu triomphant et 58 L'Ère du vide de Gilles Lipovetsky, Editions Gallimard, paru le 22 septembre 1983 59 Article « La Télévision n’est pas le nouveau malin génie » par Serges Guérin, extrait de la revue Médias N°6, septembre 2005, consulté le 11 octobre 2012 : http://www.revue-medias.com/La-television-n-est-pas-le-nouveau,132.html 17
  • 18. lui proposait d’oublier ses soucis grâce au plaisir éphémère et superficiel ! » commente Robert Rochefort dans La Société des Consommateurs60. Un stade de la consommation succède donc à un autre, ce qui se traduit par différentes grandes tendances de communication liées à ce stade de consommation. L'ère du vide et du rêve n'est pas aujourd'hui tout à fait terminée, même si elle semble révolue, on retrouve encore quelques-unes de ses grandes idées dans certaines publicités, notamment pour le luxe et la mode. La campagne de publicité « Beach Sensation » pour les maillots de bain H&M61 présentant des mannequins au bronzage superficiel dans un décor de rêve est un bel exemple. Ces publicités n’ont pas plu aux consommateurs, ni au Fonds Cancer Suédois qui s’était indigné du bronzage excessif auquel incite indirectement la publicité: « Ces femmes en bikini extrêmement bronzées confirment un idéal de beauté dangereux pour la santé »62. La marque a ainsi dû présenter ses excuses dans un communiqué de presse officiel, expliquant que le bronzage du mannequin brésilien Isabeli Fontana permettait de mieux faire ressortir les maillots de bain de la marque. Quoi qu’il en soit cette polémique nous apprend une chose : les consommateurs ne sont pas dupes et ils n’hésitent plus à se faire entendre, notamment sur Internet, lorsqu’une publicité va trop loin. Les marques ont donc bien compris qu’il leur fallait miser sur autre chose pour communiquer, et on a vu émerger une nouvelle ère de communication ces dernières années en France et dans les pays Occidentaux, l’ère de la transparence. S’intégrant dans différentes sphères de la communication, on la retrouve aisément dans des publicités, des packagings ou même sur des sites Internet. Premier exemple, le spot publicitaire « Back to the Start » pour la marque Chipotle63 récompensé par un Grand Prix au 59e Festival International de la Créativité Cannes Lions qui a eu lieu du 17 au 23 juin 2012. L’histoire de ce film de deux minutes est celle d’un agriculteur exploitant une petite ferme d’animaux, qui va grandir de plus en plus avant d’atteindre une taille critique et industrielle que l’agriculteur rejette. Il décide alors d’ouvrir à nouveau ces enclos et de laisser libres ces animaux, et recommencer depuis le début pour ne pas retomber dans un élevage industriel. Il rejoint ensuite sa famille, dont le fils qui a l’air d’être intéressé par l’élevage lui aussi. Le film se termine sur le message « Cultivate a better world »64. La marque Chipotle utilise le storytelling pour mieux 60 Chapitre VI « La consommation doit rassurer », p. 139, La Société des Consommateurs, Robert Rochefort (2001 – Editions Odile Jacob) 61 Cf annexe 6 : Publicités H&M (Mai 2012) 62 Source : H&M s'excuse d'une publicité "trop bronzée", Théodore Doucet, sur Europe1.fr le 11 mai 2012, consulté le 12 juin 2012. http://www.europe1.fr/International/H-M-s-excuse-d-une-publicite-trop-bronzee-1079113/ 63 Source : « Back to the Start » de Chipotle Mexican Grill, diffusé à partir du 25 août 2011 sur Youtube. http://www.youtube.com/watch?v=aMfSGt6rHos 64 Traduction : « Cultiver un monde meilleur » 18
  • 19. toucher le spectateur. Selon Christian Salmon, auteur de Storytelling. La machine à fabriquer les images et à formater les esprits65, le storytelling est l’art de raconter des histoires, dans le but de convaincre le consommateur. « Mais aussi de le plonger dans une histoire dont il pourrait être le héros. Le storytelling correspond à la construction consciente de croyances destinées à des consommateurs en manque de repères. » précise Nelly Quemener, dans son analyse pour la revue Communication66. Le storytelling n’est donc pas uniquement un moyen d'orienter le consommateur, il lui permet de se sentir (un peu) plus actif. La publicité classique a longtemps fait rêver les consommateurs et l'on peut remarquer que cette notion de rêve est commune à une autre pratique, celle du jeu-vidéo. En effet, les mécaniques du jeu vidéo tentent de satisfaire le joueur alors que son univers et son histoire tentent de l'immerger dans un rêve éveillé auquel le joueur aura envie de faire partie. Nous parlons évidemment ici du jeu vidéo classique, et non du jeu vidéo publicitaire. Des jeux tels que Grand Theft Auto Vice City67 où le joueur se retrouve totalement libre et capable de faire ce qu'il veut (ou presque) dans une ville aux allures de Miami. Autre exemple, les jeux de course automobile comme la série des Burnout ou celle des Need For Speed où le joueur peut déambuler dans les rues des plus grandes capitales du monde à plus de 200 km/h, relèvent totalement du rêve. Les univers originaux créés par les studios d'Ubisoft sont également une référence, de Prince of Persia à Beyond Good & Evil en passant par Assassin's Creed où le héros revit l'histoire de son ancêtre, un assassin d'élite pendant les Croisades. Les univers d'autres jeux vidéo mythiques font également penser à des décors féériques, tout droit issus de rêves. Prenons par exemple, les jeux créés par Shigeru Miyamoto : « la liste des jeux sortis de l'imagination constitue la plus impressionnante série de chefs d'œuvre vidéo-ludiques que l'on puisse imaginer. »68 Le personnage le plus célèbre créé par Miyamoto reste sûrement Mario, dont la licence de jeu vidéo est la plus vendue au monde avec plus de 210 millions d'exemplaires. Mario69 est un plombier italien moustachu habillé d'une casquette rouge et d'une salopette bleue, apparu pour la première 65 Storytelling. La machine à fabriquer les images et à formater les esprits, Christian SALMON, (2007 - La Découverte). 66 Lecture « Christian SALMON (2007), Storytelling. La machine à fabriquer les images et à formater les esprits », Nelly Quememer, dans Communication, Vol. 29/2 2012. Texte intégral : http://communication.revues.org/index2635.html 67 Grand Theft Auto : Vice City, Rockstar Games, Sorti en 2003 sur PC. 68 Source : Art Ludique, p.404, de Jean-Jacques Launier et Jean-Samuel Kriegk (2011 – Editions : Sonatine) 69 Cf annexe 7 : Super Mario 19
  • 20. fois en 1981 dans le jeu Donkey Kong sous le nom de Jumpman, où il devait secourir une princesse en détresse70. Le premier jeu dédié exclusivement à ce personnage s'intitule Super Mario Bros. Sorti en 1985 sur NES (Nintendo), ce jeu prend forme dans un univers féérique où Mario doit tenter de délivrer la princesse Peach, prisionnière du château de Bowser, sorte de dragon démoniaque anthropomorphique71. Dans ce périple, Mario est accompagné de son frère Luigi, autre plombier italien moustachu habillé de vert, et de Yoshi, un dragon vert qui pond des œufs multicolores. Mario doit traverser le Royaume Champignon et de nombreux « mondes » débordants de champignons, d'étoiles, d'obstacles et de pièges en tout genre, remplis de tortues à carapaces rouges, de fleurs crachant des boules de feu, ou encore de Chain Chomp, une boule noire géante se comportant comme un chien attaché à une chaîne. Autant de péripéties et d’originalités dignes d’un rêve ! « L'une des plus attachantes facettes du génie artistique de Miyamoto est d'avoir puisé au sein même de la nature et de ses émotions d'enfant toute l'inspiration des logiciels qu'il a ensuite conçus pour faire jouer et rêver les générations suivantes »72 commentent Jean-Jacques Launier et Jean-Samuel Kriegk, auteurs d'Art Ludique. Miyamoto a fait rêver des générations de joueurs grâce à ces univers et ces personnages. Nous n'avons cité que Super Mario Bros ou Donkey Kong mais nous aurions pu également évoquer The Legend of Zelda73 où le jeune Link à l’aide de son épée et son bouclier, traverse le monde fantastique d’Hyrule afin de retrouver les huit fragments de la Triforce et sauver la princesse Zelda. Ces jeux féériques sont autant de jeux cultes participant à l’histoire mythique du jeu vidéo. Tout comme la publicité durant ses glorieuses années, les jeux vidéo font rêver ou ont fait rêver de nombreux joueurs. Prolonger la relation entre marque et consommateur au sein d'un jeu vidéo publicitaire permettrait donc de poursuivre le rêve publicitaire d'une nouvelle manière ? Certainement, mais à condition que le jeu vidéo soit de bonne qualité, sans quoi le joueur internaute passera son chemin. Faire rêver les joueurs peut s'avérer beaucoup plus compliqué pour les marques, c'est ce que nous verrons par la suite dans la description du game design et de l'intérêt de l'advergame pour les internautes-consommateurs. Quoi qu’il en soit, la passerelle entre 70 Cf annexe 8 : Jumpman dans Donkey Kong, sur borne d’arcade (1981 – Nintendo). 71 Cf annexe 9 : Super Mario Bros, sur NES, (1985 – Nintendo) 72 Source : Art Ludique, p.400, de Jean-Jacques Launier et Jean-Samuel Kriegk (2011 – Editions : Sonatine) 73 Cf annexe 10 : The Legend of Zelda, sur NES (1986 – Nintendo) 20
  • 21. jeu-vidéo et publicité établit ici est indispensable pour comprendre l’émergence de l’advergaming comme pratique de communication. On retiendra que le jeu vidéo représente une véritable opportunité, dans la continuité de l’âge d’or de la publicité. Michel Foucault parlait ainsi des espaces ludiques en 1984 : « l’espace de jeu paraît une utopie dans laquelle je ne suis pas réellement » comme le reporte Tony Fortin et Laurent Trémel dans Mythologie des Jeux Vidéo. Ils poursuivent alors « les espaces ludiques sont certainement pour beaucoup des « hétérotopies » au sens de Michel Foucault, c’est-à-dire des lieux concrets, réels, qui hébergent une utopie. »74. Le jeu vidéo serait donc l’endroit idéal pour allier une histoire utopique à une expérience ludique. Tony Fortin et Laurent Trémel confirment même que « les scénarios des jeux vidéo apparaissent en effet souvent fondés sur un itinéraire – le parcours du héros – assimilés par certains observateurs à celui des contes. » La présence de storytelling est un autre point commun du jeu vidéo et de la publicité, tous deux peuvent donc logiquement se rejoindre au sein de l’advergaming, afin d’attirer à nouveau l’attention du spectateur, de plus en plus actif et exigeant. 3. L’attention publicitaire au cœur du débat « Aujourd’hui, la rareté n’est plus l’information, mais bien l’attention. A une époque où le public devient de plus en plus volage, surfant de page Web en page Web, papillonnant de chaîne en chaîne, le jeu vidéo dispose d’un avantage majeur : il permet de garder disponible l’utilisateur en un même lieu. »75 La notion de « Return On Attention » semble remplacer progressivement celle de « Return On Investment » tant utilisée dans le marketing pour mesurer l'efficacité et la rentabilité des actions marketing. Selon l'abécédaire du jeu vidéo de la revue Tank « le ROA mesure la visibilité d'une campagne de communication plurimédia. »76 Historiquement, l'attention publicitaire a toujours été considérée par les professionnels de la communication dans l'élaboration de leurs stratégies. Pour preuve le modèle AIDA qui représente les différentes phases que doit respecter un message publicitaire : 74 Mythologie des Jeux Video, p. 30, Laurent Trémel et Tony Fortin, (2009 - Editions : Cavalier bleu) 75 Source : Article « Le jeu, nouvel espace de relations sociales », p. 35 , Tank, numéro #1, « Play Time. Communiquer à l’ère du jeu » (2012 - Editions : Télémaque) 76 Source : Ibid, p 81. 21
  • 22. - Attirer l'Attention - Susciter l'Intérêt - Provoquer le Désir - Inciter à l'Action C'est bien ce premier point qui nous intéresse : attirer l'attention. Comment capter un utilisateur hypersollicité sur le web et dont l'attention vaut de l'or à l'heure où les audiences s'écroulent et où les consommateurs tentent de reprendre le contrôle sur le message ? Le problème de l’attention publicitaire, développé plus en détails par Daniel Bô et Matthieu Guével dans Brand Content, Comment les marques se transforment en médias77, fait partie des mutations au sens large qui ont influencé le monde de la communication ces dernières années. Ils identifient ainsi trois mutations de la communication : - L’essor d’Internet et de la numérisation - L’essor de la communication responsable - La remise en cause des discours L’essor d’Internet et de la numérisation est le point qui nous intéresse tout particulièrement car il révèle les évolutions du contexte médiatique, dont la première est, selon Daniel Bô et Matthieu Guével, la fragmentation de l’audience et la dispersion des publics : « Le modèle traditionnel de la communication des marques postulait l’existence de quelques médias de masse, et la possibilité de réunir un grand nombre de personnes devant un même contenu au même moment. »78 Ce modèle est aujourd’hui remis en cause par la fragmentation de l’audience causée par la multiplication des chaînes de télévision et surtout l’arrivée d’Internet. Les auteurs anticipent même que : « la démocratisation de l’Internet mobile, l’essor de la catch’up TV vont encore multiplier les canaux et accès individuels aux contenus. »79 Rajoutons à cela l’arrivée de la TNT (Télévision Numérique Terrestre), le piratage de contenus, et surtout l’essor de la télévision connectée, qui fait aujourd’hui l’actualité dans le milieu des médias, et qui risque de contribuer fortement à la remise en cause du modèle traditionnel de la publicité, basé sur l’audience. Le schéma choisi par Daniel Bô et Matthieu Guével pour représenter les conséquences de l’érosion de l’audience sur la publicité et la qualité 77 Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod) 78 Ibid, p. 16 79 Ibid, p. 29 22
  • 23. des contenus est le suivant : l’érosion des audiences des contenus entraîne une baisse de l’efficacité publicitaire. En effet - et cela semble logique - s’il y a moins de téléspectateurs, la publicité touchera moins de monde. Cette baisse de l’efficacité publicitaire a pour conséquence une réduction des ressources consacrées à la publicité et donc au financement des contenus. Les cibles de communication n’étant pas forcément atteintes et les indicateurs de performances n’étant pas satisfaisant, la publicité bénéficie de ressources réduites par la suite. Ce qui entraîne au final une moindre qualité des contenus et donc, encore une fois une baisse des audiences de ces contenus. Voilà comment est justement présenté « le cercle vicieux de l’érosion des audiences » par Joseph Jaffe dans Life After 30-second Spot, repris dans Brand Content80. Si communiquer, c’est transmettre un message, alors on peut constater aujourd’hui que les marques ont de plus en plus de mal à communiquer… Symbole de l’érosion des audiences, TF1 a récemment enregistré son mois d’audience le plus faible de son histoire avec seulement 22,2% de part d’audience81. Loin des 40% d’audience dont elle avait l’habitude jusqu’au début des années 2000, la première chaîne française ne cesse de voir ses audiences chutées. Les causes citées plus haut, à l’origine de cette érosion, participent à la fin d’une ère médiatique dominée par la course à l’audience où TF1 vendait « du temps de cerveau disponible » à Coca-Cola selon la célèbre formule de Patrick Le Lay, ancien PDG de TF1. La chaîne est ainsi obligée de revoir ses tarifs publicitaires à la baisse, ce qui entraîne une baisse de la qualité des contenus. Ainsi, si TF1 ne parvient plus si facilement à toucher une audience large et à l’écoute, on peut également s’intéresser à la notion de saturation des contenus, de plus en plus actuelle avec la démocratisation d’Internet et qui remet tout à fait en cause l’efficacité publicitaire. Notons tout d’abord que par « démocratisation d’Internet » nous entendons l’utilisation de plus en plus courante d’Internet par des millions d’internautes grâce à l’accès au haut débit en illimité dans des millions de foyers. On peut considérer que cette démocratisation a débuté à partir de la fin des années 1990, et que son impact s’est véritablement ressenti à partir des années 2000 avec la multiplication des fournisseurs d’accès à Internet en France. 80 Ibid, p. 30 81 Source : Article « AUDIENCES JUIN : TF1 AU PLUS BAS, M6 AU PLUS HAUT, NRJ 12 DOUBLE CANAL+ », Julien Lalande, sur Ozpa.com, publié le 2 juillet 2012, consulté le 26 juillet 2012. http://www.ozap.com/actu/audiences-juin-tf1-au-plus-bas-m6-au-plus-haut-nrj-12-double-canal/441729 23
  • 24. Internet, ce réseau mondial informatisé basé sur la liberté, le partage et la gratuité, a permis d’accéder à une profusion d’informations et de contenus en tout genre. « Il n’y a plus assez de 24 heures d’une journée pour regarder tous les contenus accessibles facilement sur une quantité croissante de supports »82 résument plutôt bien les auteurs de Brand Content. Cette profusion de contenus a donc engendré une « hyper-sollicitation de l’attention » : l’internaute est sollicité de toutes parts et peut faire le choix de choisir librement le contenu qu’il souhaite regarder, il faut donc que le contenu de marque soit de qualité, attractif et affinitaire pour que l’internaute soit intéressé. « Dans une économie de l’attention, seul le contenu capable d’attirer l’attention et de la retenir pourra tirer son épingle du jeu » 83 confirment ainsi les auteurs. Sur Internet, un spot publicitaire semble donc peu enclin à attirer l’attention face à des contenus désintéressés, surtout dans un contexte défavorable que nous avons évoqué précédemment de publiphobie ambiante. Le digital est un environnement saturé, comment alors favoriser un contenu de marque face à l’hyper- sollicitation dont sont victimes les internautes ? La profusion de contenus participe à l’inefficacité publicitaire car l’internaute ne ressent pas l’intérêt de regarder des contenus publicitaires alors qu’il a le choix. De plus, les nombreuses publicités qui sont visibles avant le visionnage d’une vidéo sur les plateformes comme Youtube ou Dailymotion, semblent se généraliser mais posent toujours le problème de l’attention de l’internaute. Comment savoir si l’internaute voit réellement la publicité ? Comment mesurer l’efficacité de cette pub alors que l’internaute peut être en train de faire autre chose sur un autre site en parallèle ? Pour résoudre ce problème, de nombreuses plateformes de vidéo contraignent l’utilisateur à visionner une publicité avant une vidéo : cette pub se met en pause si l’internaute change de fenêtre sur son navigateur ou s’il coupe le son. Un dispositif plus que gênant et polémique en termes de liberté de navigation sur le web. Les marques doivent donc trouver un nouveau moyen d’attirer l’attention des consommateurs afin de faire passer leurs messages de manière moins contraignante. Valéry Pothain, auteure de l'article « Les Marques doivent jouer le jeu » pour CB News résume ce que peut résoudre le jeu vidéo au problème de l'attention publicitaire : « Le consommateur n'a plus une minute pour regarder un écran publicitaire, mais il arrivera toujours à en trouver dix pour exploser des cochons à grands coups d'oiseaux avec Angry Birds. Contrairement à l'idée reçue, le 82 Source : Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, p. 37, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod) 83 Ibid, p. 38 24
  • 25. problème n'est donc pas tant sa rareté que le moyen de se l'accaparer à des fins commerciales. »84 Nous reviendrons plus en détail sur les solutions apportées par les marques pour répondre à ce manque d'attention (l’advergaming notamment), mais intéressons-nous un instant au rôle du consommateur dans ce schéma de communication, et la révolution du modèle appelé « top- down ». Le modèle révolu de la communication « top-down » Ce modèle de communication consiste à considérer que la marque (top) communique de manière magistrale envers ses consommateurs (down). « La démocratisation du métier d'éditeur » comme l'évoque le livre Brand Content85, permet à tout le monde de créer du contenu et court-circuiter les médias traditionnels. C'est ce changement de statut qui intéresse actuellement les professionnels de la communication, où, dans une économie de l'attention, les spectateurs ne vont plus forcément se tourner vers des contenus publicitaires, mais vont chercher à reprendre le contrôle. En ce sens, le modèle « top-down » des grands discours de marques est révolu, il laisse place à une prise de participation du consommateur, de quelque manière que ce soit : « After decades of advertisers blaring messages at consumers, those consumers now have their own megaphones to blare back. »86 prévient Nick Summers. « Le consommateur/internaute est passé de spectateur de campagnes de publicité à acteur diffuseur de contenus de marque. Il est en attente de divertissement et de sensation, il veut être surpris à chaque rencontre avec la marque. Il peut pouvoir interagir, personnaliser le contenu pour ensuite le partager avec sa communauté. Les webséries, les jeux vidéo sont les médias de l'innovation et du participatif. Ils permettent de faire émerger les marques par un contenu créatif fort et différenciant. » Selon Romain Mourgue, Directeur New Business d'Ilomba Images87. Différenciant et participatif, voici donc les maître-mots des contenus attendus par les consommateurs. Comment se caractérise alors ce changement de statut pour le consommateur ? Cela passe par du partage sur les réseaux sociaux (Facebook et Twitter en tête), du User Generated Content (UGC) sur des plateformes vidéo comme Youtube ou Dailymotion, ou d'autres plateformes 84 Source : Article « Les marques doivent jouer le jeu » p.46, Valéry Pothain, CB News, « La pub cherche son gameplay » (Juin 2012 – Dupuis Presse France) 85 Source : Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, p. 36, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod) 86 Source : Article “Click this ad already!” de Nick Summers, p. 47, Newsweek, numéro du 26 mars et 2 avril 2012 (Editions : Daily Beast Company). Traduction : « Après des décennies où les publicitaires pouvaient hurler des messages aux consommateurs, ces consommateurs ont maintenant leurs propres mégaphones pour hurler en retour. » 87 Source : Article « Le jeu, nouvel espace de relations sociales », p. 39 , Tank, numéro #1, « Play Time. Communiquer à l’ère du jeu » (2012 - Editions : Télémaque) 25
  • 26. proposées par les marques, comme par exemple Procter and Gamble pour la campagne Thank You Mom où les internautes pouvaient adresser un message de remerciement à leurs mères par message textuel ou vidéo88. À la notion de Return on Attention s'ajoute donc celle de « Return on Engagement », dont la fonction est de « mesurer l'implication et l'interaction des internautes : simple lecture d'un article, partage et discussion dans un réseau social, rédaction d'un avis, création d'UGC... »89 selon l’Abécédaire du jeu vidéo de la revue Tank. L'implication et la prise de participation, voire de contrôle du consommateur, révolutionne donc le modèle de communication, et favorise l'avènement de nouveaux modes de communication pour mieux capter l'attention des consommateurs, comme l'advergaming, qui s'est fait une belle place sur Internet, cette toile vecteur de liberté et d'autonomie de l'utilisateur. B) Une évolution « digitale » 1. A l’origine, des valeurs de liberté et indépendance du web « La Quadrature du Net est une organisation de défense des droits et libertés des citoyens sur Internet. Elle promeut une adaptation de la législation française et européenne qui soit fidèle aux valeurs qui ont présidé au développement d'Internet, notamment la libre circulation de la connaissance. À ce titre, la Quadrature du Net intervient notamment dans les débats concernant la liberté d'expression, le droit d'auteur, la régulation du secteur des télécommunications ou encore le respect de la vie privée. Elle fournit aux citoyens intéressés des outils leur permettant de mieux comprendre les processus législatifs afin d'intervenir efficacement dans le débat public. »90 Telle est la description de la mission de la Quadrature du Net, symbolique de l’esprit de liberté et d’indépendance revendiqué par Internet pour assurer son développement dans la gratuité et le partage. « Au commencement était le code et la liberté », voici comment Fabien Benoît intitule le chapitre consacré à la création d'Internet dans les années 1960-1980, dans le numéro 2 d'Usbek et Rica 88 Chaîne Youtube de Procter & Gamble, consulté le 12 août 2012 : http://www.youtube.com/proctergamble?x=us_thankyoumom 89 Source : Abécédaire du jeu vidéo, p. 81 , Tank, numéro #1, « Play Time. Communiquer à l’ère du jeu » (2012 - Editions : Télémaque) 90 Source : « Qu’est-ce-que la Quadrature du Net ? », surlaquadrature.net, consulté le 12 août 2012. http://www.laquadrature.net/fr/qui-sommes- nous 26
  • 27. « Hackers, la révolution cool »91. Ainsi, l’origine d'Internet est marquée par une période où « chacun peut reprendre librement les idées des autres et les améliorer. Et ce, dans l’intérêt de tous. C’est dans cet esprit que les hackers composent les premiers programmes informatiques. »92 L'auteur conclut d’ailleurs : « Liberté et partage sont les lignes directrices ». Cependant, dès le début des années 1970, les grands fabricants de matériel informatique créent des logiciels « propriétaires » afin d'en restreindre la réutilisation : « ils prônent la fermeture, les hackers l'ouverture. »93 Richard Stallman, véritable icône du hacker durant les années 1980, s'est toujours opposé au logiciel propriétaire, et à la régulation d'Internet. Après avoir lancé le GNU (GNU is Not Unix) en 1984, un système d'exploitation libre pour « ramener l'esprit de coopération qui prévalait dans la communauté des hackers dans l'informatique grand public »94, cet ancien du MIT décide de fonder en 1999 une encyclopédie libre fondée sur le crowsourcing : Wikipédia. Fabien Benoît revient sur la création de l’encyclopédie : « Pour Stallman, la quête dépasse le simple cadre du logiciel, elle est philisophique. L'homme ne doit pas devenir l'esclave des machines et de ceux qui en auraient l'exclusivité de leur programmation […] Pour lui les savoirs doivent circuler librement. »95 Analysons ainsi cette notion de crowdsourcing, dont on peut ironiquement trouver une définition très complète sur Wikipédia : « le crowdsourcing, un des domaines émergents de la gestion des connaissances, est l'utilisation de la créativité, de l'intelligence et du savoir-faire d'un grand nombre de personnes, en sous-traitance, pour réaliser certaines tâches traditionnellement effectuées par un employé ou un entrepreneur. »96 En ligne, ce néologisme est donc un moyen de définir le travail collaboratif reposant notamment sur les internautes comme contributeurs de contenu. La contribution des consommateurs/utilisateurs sur Internet est de plus en plus sollicitée par les marques comme un moyen de renouveler les pratiques de marketing et de s'adapter aux évolutions technologiques. Le web se doit d'être libre, gratuit, de valoriser les internautes en prônant leur participation et le partage. Cependant, le développement d'Internet à partir des années 1990 a progressivement 91 Source : Usbek et Rica, numéro 2 « Hackers, la révolution cool », p. 22 (Printemps 2012 – Usbek et Rica) 92 Ibid, p. 22 93 Ibid, p. 22 94 Source : Usbek et Rica, numéro 2 « Hackers, la révolution cool », p. 23 (Printemps 2012 – Usbek et Rica) 95 Ibid, p. 24 96 Source : Article “Crowdsourcing” sur Wikipedia.com, consulté le 10 août 2012. http://fr.wikipedia.org/wiki/Crowdsourcing 27
  • 28. généré de plus en plus d'investissements publicitaires sur le web. Il est donc nécessaire de souligner le paradoxe qui touche ce média depuis quelques années, alors même que nous allons aborder plus en détail le sujet de l'advergaming en ligne. Les valeurs d'Internet, si l'on remonte à ses origines comme nous venons de le faire, sont en contradiction avec celles de la publicité, intéressée et commerciale, qui prône des valeurs marchandes, et régit le fonctionnement du web puisque la plupart des business models des sites web reposent sur la publicité. Pour preuve, 97% des revenus de Google reposent sur la publicité en 201197, ce qui semble logique puisqu'il s'agit du site le plus visité au monde selon Alexa. Il rassemble 48% des internautes, juste devant Facebook deuxième site le plus consulté avec 45% des internautes98 et dont les revenus reposent également majoritairement sur la publicité, à hauteur de 85% en 201199. Inspirés par les autres médias, de nombreux sites ont basé leur business models sur la publicité, ou d'autres alternatives répondant à des logiques « commerciales » : billets sponsorisés par des marques sur des blogs ou des sites spécialisés, intéressement sur des liens renvoyant à des sites e- commerce, liens sponsorisés dans les moteurs de recherche etc. Tout comme la presse, la télévision ou la radio, les revenus publicitaires des sites Internet reposent sur leur audience, leur nombre de visites ou de pages vues. Difficile alors de parler d'indépendance ! Cependant, l'avènement du web 2.0 à partir de 2005, que l'on décrit comme participatif et plus interactif, permettant aux internautes de devenir plus actifs et contribuer à leur tour à son développement. Grâce à cela, Internet a évolué, mais les marques ont également dû adapter leurs discours et leur manière de communiquer. La forme du message a eu une incidence sur le fond : les marques ne communiquent plus uniquement sur elles-mêmes à destination des consommateurs (modèle top-down), mais proposent un contenu à un public, parfois détaché de leurs domaines d’activité, de leurs fonctions commerciales. L'émergence d’Internet puis de la vague sociale durant les années 2000, avec la naissance de Facebook et Twitter ont permis aux marques d’entrer en contact plus direct avec leurs publics. De plus, le changement de discours des marques, dans l'obligation de revoir le modèle classique de la publicité, dépassé et inadapté, a permis l'arrivée d'un nouveau mode de communication : 97 Source : “Where’s Google making its money” sur PCInpact.com, le 19 juillet 2011, consulté le 22 août 2012. http://www.pcinpact.com/news/64689-google-revenus-publicitaires-assurances-pret.htm 98 Source : Topsites sur alexa.com, consulté le 22 août 2012. http://www.alexa.com/topsites 99 Source : Article « Facebook: 85% des revenus par la publicité, 12% par Zynga » sur Maxisciences.com, le 2 février 2012, consulté le 22 août 2012. http://www.maxisciences.com/facebook/facebook-85-des-revenus-par-la-publicite-12-par-zynga_art21328.html 28
  • 29. le brand content. Avec la démocratisation du web, les marques ont donc saisi cette opportunité, contraintes quoi qu’il arrive de s’adapter, pour proposer un contenu majoritairement en ligne, dans lequel s’inscrit l’advergaming. 2. L’évolution des agences de publicité On comprend un peu mieux la perception de l’incursion du digital dans le monde de la publicité avec le livre célébrant les 10 ans de l’agence Leg réunissant les plus belles publicités sur papier de cette dernière. Ce livre intitulé Merde à Internet. Dix ans de publicité sur papier de l’agence Leg100 traduit ainsi parfaitement le ressentiment des publicitaires vis-à-vis d’Internet et son impact dans le monde de la communication. Le texte de la quatrième de couverture du livre évoque bien de façon ironique les enjeux du web aujourd’hui, que l’agence Leg tente d’ailleurs d’ignorer : « Internet est-il le tout média qui va se substituer à tous les média ? L’interactivité sonne-t-elle le glas de la communication unilatérale ? Twitter est-il le média des post-ados ou des post-addicts ? Facebook peut-il faire tomber les dictatures ou nous éloigne-t-il du monde réel ? La révolution digitale restera-t-elle underground ou est-elle déjà dans les mains des firmes ? Autant de questions auxquels ce livre ne répond pas puisqu’il n’y est question que de publicités imprimées sur papier.»101 Les agences de publicité ont su évoluer au fil des années pour se doter progressivement de pôle digital. Les agences ont durant un temps proposé des recommandations basées sur des « stratégies 360° » mixant presse, radio, télévision, affichage, hors média et Internet. Certaines ont déjà abandonné cette communication à 360°, par manque d’efficacité ou de pertinence, pour se concentrer sur le digital ou le conversationnel dès l’arrivée des réseaux sociaux. Les agences dites « conversationnelles » sont des agences spécialisées dans le conseil en communication, sur les réseaux sociaux ou les sites des marques. Leur expertise est donc bien différente de celle de la publicité classique. Cependant, les recommandations stratégiques « digitales » ou « sociales » se doivent d’être en cohérence avec le positionnement des stratégies de communication globales mises en place par les agences de publicité. De manière générale, les agences de publicité et de conseils en communication se sont donc intéressées au brand content, favorisé par l’émergence d’Internet, dont l’advergaming est l’un des meilleurs exemples. 100 Merde à Internet. Dix ans de publicité sur papier de l’agence Leg, (Agence LEG, 2012). 101 Ibid, 4e de couverture. 29
  • 30. C) Le brand content comme opportunité 1. Brand content : définition et exemples L’avènement du brand content Afin de définir la notion de « brand content » ou contenu de marque, il faut signaler que nous nous appuierons essentiellement sur l’ouvrage déjà évoqué en référence, de Matthieu Guével et Daniel Bô : Brand Content, Comment les marques se transforment en médias102. Dans une société marquée par la profusion publicitaire, les marques connaissent aujourd’hui des difficultés pour transmettre leur message publicitaire. Or communiquer, c’est transmettre un message et « de fait, la publicité fut d’abord et essentiellement l’art de transmettre un message. » 103 Les marques doivent alors faire face à ce problème : « les individus ne cherchent pas à s’exposer à des messages. C’est au messager d’aller à l’encontre de son destinataire pas l’inverse. Il faut donc au préalable, réussir à créer le contact et capter l’attention au bon endroit, au bon moment. »104 Nous revenons encore une fois à la logique d’attention publicitaire mentionnée plus haut, comment les marques peuvent-elles alors résoudre cette équation et réussir à transmettre leur message ? Comme nous l’avons vu précédemment, les différentes mutations médiatiques que sont la fragmentation de l’audience, la prise de pouvoir du consommateur-spectateur, la démocratisation du statut d’éditeur et l’hyper-sollicitation des spectateurs, ont participé à la baisse de l’attention publicitaire et à la difficulté des marques de capter leur audience. L’internaute change de statut : du stade de consommateurs, il est passé à spectateur ; de cible, il est devenu public. Public et cible sont deux entités distinctes 105: à travers l’advergaming et le brand content, la marque s’adresse à la partie conjointe de ces deux entités. Lorsqu’il s’agit de brand content, il est donc préférable de parler de spectateurs ou de public plutôt que de consommateurs puisque la marque propose un contenu et non pas un produit ou une publicité. « Il devient essentiel d’offrir un contenu auquel les spectateurs accepteront de s’exposer d’eux-mêmes. Sans minimiser le fait que les marques ont depuis longtemps cherché à concevoir des publicités suffisamment attractives pour émerger dans les tunnels de publicités télé ou presse, cet impératif se pose aujourd’hui à un niveau nettement plus élevé. »106 C’est dans ce contexte qu’est apparu le brand content, afin d’offrir une opportunité 102 Source : Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod) 103 Ibid, p. 16 104 Ibid, p. 16 105 Cf annexe : Schéma : public et cible, deux entités distinctes. 106 Source : p. 34, Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod) 30
  • 31. aux marques de renouveler leur communication, une véritable alternative aux différentes solutions proposées jusqu’alors pour s’associer à des contenus comme le sponsoring, le placement de produit, ou encore l’in-game advertising, la publicité dans les jeux vidéo. Une définition du brand content Donnons maintenant une définition complète du brand content. Il s’agit d’un « contenu éditorial créé ou largement influencé par une marque. La marque ne se contente pas de parrainer ou d’utiliser un contenu préexistant, mais assume jusqu’au bout un vrai rôle d’éditeur, finance et fabrique un contenu souvent à partir de son propre fonds. Les marques dont l’offre de brand content est suffisamment étoffée deviennent des marques médias. »107 Le contenu est donc au service de la marque, entièrement, et à l’attention du spectateur, uniquement. La notion de marque média mérite elle aussi d’être définie. Une marque média est une « marque ayant totalement assumé et investi le statut d’éditeur, au point de proposer une offre de contenus suffisamment étoffée pour exister de façon autonome, voire d’être commercialisée comme un produit à part entière. »108 Un parfait exemple de marque média peut être celui de la marque Red Bull dont le contenu de la chaîne Youtube109, renouvelé et renfloué plusieurs fois par jour de vidéos de sports extrêmes tournées à travers le monde, est d’une qualité égale si ce n’est supérieure, à celle d’une chaîne de télévision. Et sur ce point les internautes ne s’y trompent pas, la chaîne Youtube de Red Bull compte ainsi plus de 500 000 abonnés et 315 millions de vues, des indicateurs de performance très largement au-dessus de la moyenne. Si le contenu est exclusivement à l’attention du consommateur-spectateur, c’est aussi pour lui offrir une véritable contrepartie, une contrepartie au fait d’être exposé au message de la marque. On peut ainsi évoquer les notions de don et de contre-don sous-jacentes au contenu de marque : la marque fait un don de contenu en vue d’un achat futur éventuel (contre-don du consommateur). « La communication doit s’inviter chez le spectateur comme une expérience riche, avec un bénéfice immédiat. »110 Divertir, faire vivre une véritable expérience au spectateur, proposer un contenu intéressant plutôt qu’intéressé, telles sont les clés du brand content. Selon les auteurs, le contenu 107 Ibid, Définition du brand content, p. 182 108 Ibid, Définition de marque média, p. 184 109 Chaîne Youtube de Redbull Energy Drink, consulté le 4 juin 2012. http://www.youtube.com/redbull 110 Source : p. 38, Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod) 31
  • 32. est d’ailleurs un « objet culturel autosuffisant et autonome. »111 Il n’a pas besoin d’être affilié à une marque pour se promouvoir, bien au contraire. C’est son indépendance qui peut lui garantir un certain succès sur la toile. On peut prendre l’exemple de BNP Paribas avec la série « Les Colocs » diffusées sur Dailymotion qui a connu deux saisons et compte près de 4 millions de vues112. Après avoir analysé les notions de brand content, de marques média et de contenus, intéressons- nous maintenant à celle de « public ». « Le public est un groupe autonome », il ne s’agit pas forcément de consommateurs. Le public lecteur du magazine Colors de Benetton n’est pas forcément acheteur de la marque. « Le public est une collectivité sociale dont les membres interagissent entre eux. »113 Les membres d’un public constituent potentiellement une communauté, où ils peuvent partager ou échanger. « Les personnes qui composent un public débattent, échangent, argumentent et discutent entre eux d’un objet. »114 Dans ce sens, la marque met à disposition du public un objet, un contenu, qu’il peut à son tour partager sur cet « espace public » qu’est Internet. L’occasion pour nous de reprendre la définition d’espace public de Jürgen Habermas : « processus au cours duquel le public constitué d'individus faisant usage de leur raison s'approprie la sphère publique contrôlée par l'autorité et la transforme en une sphère où la critique s'exerce contre le pouvoir de l'État »115. Une définition toujours d’actualité… Rendre publique un contenu sur Internet renvoie donc à cette notion d’espace public, où l’individu est libre de partager un message, d’échanger, de discuter sur un contenu, de manière indépendante de la marque (sans que celle-ci ne lui ait imposé cette action). De plus, la démocratisation de l’édition évoquée par Daniel Bô et Matthieu Guével, permise par l’émergence du web, offre l’opportunité à tous les internautes de créer du contenu, fabriquer son site et court-circuiter en partie les médias traditionnels. On constate d’ailleurs l’émergence d’internautes « stars » sur la toile, qui ont su gagner en notoriété uniquement grâce au contenu proposé au public. C’est le cas par exemple de Cyprien (Monsieur Dream) 116 ou Norman fait des vidéos117. Ces jeunes comiques ont été révélés grâce à leurs vidéos sur les plateformes de partage Youtube ou Dailymotion, ils comptent des milliers d’abonnés à leurs chaînes respectives et totalisent des millions de vues à chaque nouvelle vidéo postée. Certains ont d’ailleurs réalisé des 111 Ibid, p. 54 112 Chaîne Dailymotion des Colocs, consulté le 4 juin 2012. http://www.dailymotion.com/mescolocs 113 Source : Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, p. 69, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod) 114 Ibid, p. 70 115 L'espace public : archéologie de la publicité comme dimension constitutive de la société bourgeoise, Jürgen Habermas (Payot - 1962). 116 Chaîne Youtube de Cyprien (Monsieur Dream), consulté le 4 juin 2012 : http://www.youtube.com/user/MonsieurDream 117 Chaîne Youtube de Norman, consulté le 4 juin 2012 : http://www.youtube.com/user/NormanFaitDesVideos 32
  • 33. partenariats avec des marques, comme Norman avec Crunch, qui a fait l’objet d’une web-série de 8 épisodes sur Youtube, où le jeune comique était envoyé selon les choix des internautes dans diverses destinations pour la campagne digitale « Sors Norman de sa chambre »118 (faisant ainsi référence aux vidéos amateurs filmées dans sa chambre). 2. Pourquoi les marques optent pour le brand content ? À la question « Pourquoi la marque devrait-elle opter pour le brand content ?" Paul Veyne répond ceci : « Pour des marques en quête de reconnaissance ou qui voient leur légitimité menacée, le contenu éditorial et le financement de divertissement collectif constituent des opportunités à saisir. »119 Cette analyse anticipait les opportunités qu’allaient connaître les marques avec l’émergence du « réseau des réseaux ». L’occasion pour elles de soigner leur image, et de dépasser le statut de simple marchand : « la marque passe du statut de vendeur au statut d’agent culturel à part entière, dont les intérêts ne sont pas uniquement commerciaux, et avec qui il devient possible de nouer des relations plus complexes. »120 Les marques peuvent aussi profiter du brand content pour soigner leur identité grâce au contenu. Cartier nous expose ainsi ses valeurs dans un film intitulé Odyssey et réalisé par Bruno Aveillan, révélant son identité de marque dans un court métrage de qualité de 3 min 30 à l’occasion du 165 e anniversaire de la marque121. Dans un autre genre cette fois, les marques peuvent présenter un contenu divertissant, dont le principal objectif est un objectif d’image : renforcer ou créer de la notoriété. La marque de chaussures et de mode Converse a notamment financé la création de morceaux et clips musicaux avec des stars comme Pharell Williams (NERD), Julian Casablancas (The Strokes) et Santogold. Ces trois artistes ont collaboré ensemble lors de la création du titre original « My Drive Thru » produit par NERD en 2008122. Converse a poursuivi cet effort de création chaque année, renouvelant les partenariats avec les stars d’une industrie musicale en crise, proposant alors une solution 118 Chaîne Youtube de Crunch France, consulté le 13 juillet 2012 : http://www.youtube.com/user/CrunchFrance 119 Le Pain et le Cirque, sociologie historique d’un pluralisme politique, Paul Veyne (Editions du Seuil, 1976) 120 Source : Brand Content. Comment les marques se transforment en médias, p. 96, Daniel Bô et Matthieu Guével, (2009 – Editions : Dunod) 121 Lancé le 2 mars 2012 sur le site http://www.odyssee.cartier.fr 122 Vidéo My Drive Thru sur Youtube, produite par NERD, postée le 9 juillet 2008, consultée le 15 août 2012. http://www.youtube.com/watch?v=GPZ5fnYFI4Q 33